Le 13 novembre 2024
Anne Fontaine brosse le portrait subtil d’une quête d’identité et propose une réflexion pertinente sur le travail du comédien.
- Réalisateur : Anne Fontaine
- Acteurs : Isabelle Huppert, Catherine Mouchet, Grégory Gadebois, Finnegan Oldfield, Vincent Macaigne, Catherine Salée, India Hair, Lorenzo Lefebvre, Luna Lou , Jules Porier, Sharif Andoura
- Genre : Drame, LGBTQIA+
- Nationalité : Français
- Distributeur : Mars Distribution
- Editeur vidéo : TF1 Vidéo
- Durée : 1h53mn
- Date télé : 11 septembre 2023 21:00
- Chaîne : OCS Max
- Box-office : 115.179 entrées France / 33.322 entrées Paris Périphérie
- Date de sortie : 22 novembre 2017
- Festival : Festival de Venise 2017
Résumé : Martin Clément, né Marvin Bijou, a fui. Il a fui son petit village des Vosges. Il a fui sa famille, la tyrannie de son père, la résignation de sa mère. Il a fui l’intolérance et le rejet, les brimades auxquelles l’exposait tout ce qui faisait de lui un garçon « différent ». Envers et contre tout, il s’est quand même trouvé des alliés. D’abord, Madeleine Clément, la principale du collège qui lui a fait découvrir le théâtre, et dont il empruntera le nom pour symbole de son salut. Et puis Abel Pinto, le modèle bienveillant qui l’encouragera à raconter sur scène toute son histoire. Marvin devenu Martin va prendre tous les risques pour créer ce spectacle qui, au-delà du succès, achèvera de le transformer.
Critique : Coécrit avec Pierre Trividic, scénariste et dialoguiste de Pascale Ferran (Lady Chatterley) et Patrice Chéreau (Ceux qui m’aiment prendront le train), et réalisateur de L’autre, Marvin porte la marque de cet auteur qui s’est souvent interrogé sur les affres du désir et de l’identité. À la base, le film devait être l’adaptation d’En finir avec Eddy Bellegueule d’Edouard Louis, mais Anne Fontaine et Pierre Trividic ont remodelé en profondeur la trame narrative. Ce récit d’un jeune homme qui assume son orientation sexuelle et fait le deuil d’un passé douloureux prolonge en outre des élément naguère abordés par la réalisatrice. « J’aime l’idée que des êtres puissent échapper à leur condition, que rien n’est jamais joué, jamais foutu, et qu’il est possible de transformer les obstacles en quelque chose de fort. Cela me guide depuis toujours », a déclaré Anne Fontaine. Marvin est en effet dans la lignée de l’obscur objet du désir incarné par Stanislas Merhar dans Nettoyage à sec. Ses rapports de filiation font écho aux relations compliquées entre Charles Berling et Michel Bouquet dans Comment j’ai tué mon père.
- Copyright Carole Bethuel
L’analogie entre les tourments de l’existence et l’échappée littéraire suit la symbolique de Gemma Bowery (avec Fabrice Luchini) ; tandis que le salut de Marvin par le monde du spectacle ressemble à celui de Danielle Darrieux dans Nouvelle chance et que son ascension sociale trouve de troublantes similitudes avec celle d’Audrey Tautou dans Coco avant Chanel. Loin de la joliesse du surestimé Les garçons et Guillaume, à table !, auquel d’aucuns ne manqueront pas de le comparer, le film d’Anne Fontaine séduit par ce mélange de sobriété et de lyrisme contenu, fuyant le naturalisme autant que la surenchère visuelle, avec une belle structure narrative sur deux niveaux. Car l’œuvre alterne des séquences sur l’enfance de Marvin et celles mettant en avant Martin, apprenti comédien puis artiste à succès, qui par un spectacle-catharsis règle ses comptes avec un univers familial étriqué, incapable de l’avoir protégé face à l’intolérance et l’homophobie ambiantes. Si le procédé n’est pas nouveau, cette double dimension chronologique donne ici une force indéniable de par un montage à la fois limpide et élaboré.
- Copyright Carole Bethuel
Le meilleur de l’œuvre réside dans le parcours initiatique du jeune protagoniste avec le monde de l’art : lorsqu’une proviseure bienveillante (Catherine Mouchet) lui permet l’accès à un atelier de théâtre, ou quand un professeur d’art dramatique intransigeant (Vincent Macaigne) lui fait prendre conscience de ses fêlures. Marvin trouve alors une force romanesque et émotionnelle qui n’est pas sans évoquer le Téchiné de J’embrasse pas ou des Roseaux sauvages, sans que cela ternisse l’originalité d’approche d’Anne Fontaine. Moins convaincants nous semblent les passages où le jeune homme tombe sous la coupe d’un protecteur (Charles Berling), lui-même lié à Isabelle Huppert dans son propre rôle : cette mise en abyme et ce jeu d’auto-citation pourront paraître forcés. Hormis cette réserve, Marvin est plus que recommandable, et vaut également par sa direction d’acteurs impeccable : Finnegan Odfield impressionne à nouveau, deux ans après sa prestation dans Les cow-boys, tandis que Grégory Gadebois et Catherine Salée composent avec brio deux figures parentales proches des pathétiques caricatures d’Affreux, sales et méchants et La vie est un long fleuve tranquille.
– Mostra de Venise 2017 : Lion d’or
– Sortie DVD & Blu-ray : 27 mars 2018
La chronique vous a plu ? Achetez l'œuvre chez nos partenaires !
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
toutpouretreheureux 29 octobre 2017
Marvin ou la belle éducation - Anne Fontaine - critique
La critique très positive , me paraît insuffisante . Il y a du religieux , image de Bernanos , une résilience , une catharsis créatrice , un amour paternel inattendu , une histoire parallèle Marvin Enfant - Marvin - jeune homme : qui se répondent . Des acteurs personnages passeurs ( Mouchet - Macaigne ) , une pureté , un jeu sur l’identité sexuelle , un hommage à Cocteau , une fièvre proche de Rendez- Vous de Téchiné .
Finn Oldfield est un Laurence Harvey moderne .
Le pressing de Nettoyage à sec renvoie à l’univers de Gadebois- Sallée . Berling , d’ homosexuel refoulé devient l’initiateur . Un pied de nez de Anne Fontaine .
Isabelle Huppert incarne une fée , image titulaire de l’artiste engagée .