Les garçons et Guillaume, à table ! - Guillaume Gallienne - critique

Critique : Adaptation d’une pièce éponyme à succès, où Guillaume Gallienne évoquait, sur un mode à la fois humoristique et sérieux, des personnages inspirés de sa propre histoire, le premier long métrage du comédien fut le succès surprise de l’année 2013, auréolé de cinq César, bénéficiant d’une excellente réception critique. On le sait : le propos du spectacle, comme celui du film, est d’interroger les injonctions propres à des stéréotypes de genre, dont un jeune garçon souffre, lui qui ne se détermine pas selon les critères de la virilité et, se construisant par la négation, décrète pendant longtemps qu’il est une fille, puis qu’il est homosexuel. L’incorporation de cette souffrance aurait pu nourrir une comédie toute en subtilité, mais Gallienne a choisi le contraire de la finesse : la farce hénaurme, à base de situations outrancières et de personnages hypertrophiés, qu’il s’agisse de la mère, possessive et autoritaire, du père, bourru et cinglant, bref une configuration familiale propre à une prégnance du patriarcat, qui ne se satisfait pas d’un comique gras, épais, dont la volonté est d’enfoncer le clou, non pas de le retirer, pour surplomber la douleur.
Gallienne incarne plusieurs rôles, ce qui accroît la sensation d’un one-man-show exténuant, où les autres sont condamnés à jouer les utilités (pauvre Françoise Fabian). Cette introspection très peu sympathique est un chant à la gloire du comédien et de son plaisir à démultiplier les personnages, lorsque d’autres cinéastes autobiographes (Moretti ou Allen) n’ont pas choisi une telle ostentation, pour parler d’eux et eux seuls. Les garçons et Guillaume à table ! ne doit rien à une quelconque inventivité des gags, puisqu’ils tombent à peu près tous à l’eau, comme le protagoniste délaissé par un beau jeune homme. Mention spéciale au régime lavement, scène longue et grotesque, absolument surjouée, un des moments de gêne les plus tangibles qu’on ait connu depuis, disons, les immondes navets tournés par Galabru ou Lefebvre dans les années 70-80. Si l’on cherche une véritable performance d’acteur multi-tâches, sans auto-satisfaction particulière, mieux vaut revoir le film Tootsie.