Le 8 septembre 2023
Cette satire sociale est l’un des meilleurs films d’Ettore Scola, et offre un rôle en or à Nino Manfredi, prodigieux en patriarche de bidonville.
- Réalisateur : Ettore Scola
- Acteurs : Nino Manfredi, Ettore Garofolo, Franco Merli, Maria Luisa Santella, Linda Moretti
- Genre : Comédie dramatique, Comédie noire
- Nationalité : Italien
- Durée : 1h55mn
- Date télé : 18 mars 2024 22:12
- Chaîne : Ciné+ Classic
- Reprise: 26 juillet 2023
- Titre original : Brutti, sporchi, cattivi
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 15 décembre 1976
- Festival : Festival de Cannes 1976
– Reprise en version restaurée : 26 juillet 2023
Résumé : Un bidonville de Rome, dans les années 60. Giacinto règne en tyran sur sa famille : sa femme, ses dix enfants, les conjoints, les amants et la grand-mère, tous logés sous le même toit, dans un taudis pouilleux. Tous acceptent son autorité et sa mauvaise humeur, car le patriarche acariâtre possède un magot d’un million de lires – reçues en dédommagement après avoir perdu un œil – que chacun espère lui voler. Tandis que Giacinto passe ses journées à se saouler ou à violenter les femmes autour de lui, que la fille tapine dans les rues de Rome, que le fils se travestit en femme, que la grand-mère apprend l’anglais à la télé, que la belle-fille trompe son mari avec le frère de ce dernier, que le petit fils chasse les rats morts, on prépare en cachette l’assassinat de Giacinto…
Critique : Réalisateur majeur des années 1970 et 80, Ettore Scola est aujourd’hui moins célébré que les petits maîtres du cinéma de genre transalpin, tels Dario Argento et Lucio Fulci. C’est fort injuste. Aussi peut-on se réjouir de la présence d’Affreux, sales et méchants dans la rétrospective en sept films proposée par Carlotta avec « Redécouvertes et raretés du cinéma italien ». Présenté au Festival de Cannes 1976 où il reçut le prix de la mise en scène, le long métrage, produit par Carlo Ponti, a été réalisé dans la période faste du cinéaste, entre deux autres succès critiques et publics, à savoir Nous nous sommes tant aimés et Une journée particulière. Coécrit avec Ruggero Maccari sur des dialogues de Sergio Citti, le scénario met en avant le quotidien d’une communauté de losers dans un quartier déshérité de Rome, et le tournage se déroula à Monte Ciocci, qui était occupé par des taudis jusqu’à la fin de la décennie.
- © 1976 SURF FILMS. TOUS DROITS RÉSERVÉS.
Scola combine deux genres inhérents au cinéma italien, à savoir le néoréalisme (qu’il dynamite) et la comédie, dont il propose la tendance la plus noire et bouffonne. Ce n’est pas le monde ouvrier mais un authentique sous-prolétariat que filme le réalisateur, à travers cette famille élargie cohabitant dans un sinistre logement. Et la faune qui défile sur l’écran n’est guère nuancée : patriarche radin n’hésitant pas à tirer sur son fils pour garder le magot et à installer une putain dans le lit conjugal aux côtés de son épouse qu’il violente, jeunes filles prostituées ou enceintes dès la puberté, fils travesti violant sa belle-sœur dans la cuisine, petits-enfants sauvant la grand-mère d’un incendie pour pouvoir continuer à encaisser sa pension… Scola ne fait certes pas dans la dentelle mais assume sa vision pessimiste de l’humanité en grossissant délibérément les traits et en recourant à la farce. On est loin du sentimentalisme d’un De Sica dans Le voleur de bicyclette, de la compassion chrétienne de Rossellini dans Païsa, ou du militantisme implicite de Pasolini dans Accatone, œuvres majeures et de référence au demeurant.
- © 1976 SURF FILMS. TOUS DROITS RÉSERVÉS.
On ne saurait pour autant accuser le réalisateur de mépris social. S’il n’excuse en rien les actes ignobles commis par ses personnages, Scola n’est pas dupe du déterminisme social auquel ils ne peuvent échapper. En ce sens, le film semble faire écho à L’argent de la vieille, même si Comencini était davantage engagé dans la critique sociale. On peut par ailleurs penser que Florence Quentin et Étienne Chatiliez ont été influencés par le film lorsqu’ils ont songé à la famille Groseille dans La vie est un long fleuve tranquille, qui paraît bien aseptisé en comparaison d’Affreux, sales et méchants. La réussite de l’œuvre doit également beaucoup à l’interprétation grandiose de Nino Manfredi, l’un des six mousquetaires de la commedia all’italiana, avec Totò, Mastroianni, Gassman, Sordi et Tognazzi. Son personnage de Giacinto Mazzatella restera dans les mémoires.
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Norman06 16 juillet 2009
Affreux, sales et méchants - Ettore Scola - critique
Un sommet de la comédie italienne de la grande époque. Cynisme et critique sociale sont au programme de cette œuvre corrosive qui permet en outre de (re)découvrir le talent d’un acteur un peu oublié : le génial Nino Manfredi.