César du meilleur réalisateur
Le 12 novembre 2024
Ce récit des obsèques d’un artiste est l’une des réussites de Chéreau. César du meilleur réalisateur en 1999.
- Réalisateur : Patrice Chéreau
- Acteurs : Pascal Greggory, Chantal Neuwirth, Charles Berling, Olivier Gourmet, Dominique Blanc, Jean-Louis Trintignant, Valeria Bruni Tedeschi, Vincent Perez, Roschdy Zem, Thierry de Peretti, Marie Daëms, Sylvain Jacques
- Genre : Drame, LGBTQIA+, Film choral
- Nationalité : Français
- Distributeur : Bac Films
- Editeur vidéo : Studiocanal
- Durée : 2h02mn
- Date de sortie : 13 mai 1998
- Festival : Festival de Cannes 1998
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Résumé : Jean-Baptiste Emmerich, né à Limoges, artiste peintre scandaleux et tyrannique mort à Paris, veut qu’on l’enterre à Limoges au cimetière de Louyat. C’est par cette phrase qu’il règle ses dernières volontés, lui qui voyait arriver la mort et ne voulait pas partir en laissant les autres en paix. Sous couvert d’enterrement, ce film dissèque une journée d’une quinzaine de personnages en crise, rassemblés autour d’un mort, dont la présence et le regard les faisait exister, qui ont perdu tout repère et se retrouvent obligés de se confronter les uns aux autres. Cet homme, en quittant ces vivants qu’il avait si fort influencés, les laisse face à des questions que sa présence faisait oublier.
Critique : Inspiré des obsèques de François Reichenbach, auxquelles participa Danièle Thompson, la coscénariste du film, Ceux qui m’aiment prendront le train est la seconde collaboration entre Patrice Chéreau et celle qui adapta avec lui La reine Margot. Si la patte de Thompson s’apprécie plutôt dans les dialogues, l’univers de Chéreau est dans cette description de rancœurs familiales et affectives, avec une noirceur qui est celle du cinéaste depuis La chair de l’orchidée. Comme dans La reine Margot, des frères et cousins, de sang ou par alliance, mais aussi des amants, des parents et enfants, des amis de vingt ans s’entretuent, non pas en distillant du poison mais par le mensonge, les trahisons et les coups bas. Les communautés sont cruelles chez Patrice Chéreau : on est loin des groupes conviviaux chers à Claude Sautet. Dans ce Paris-Limoges avec tarif de groupe, personne ne tient en place et la caméra passe d’un personnage à l’autre, d’un compartiment à un quai de gare, sans que jamais l’osmose ne s’installe entre des individus dont le seul véritable point commun est le lien, factice plus que sincère, avec l’artiste disparu. François (Pascal Greggory) est en couple avec Louis (Bruno Todeschini), qui n’a d’yeux que pour Bruno (Sylvain Jacques), ange noir croisé en gare mais lié par le passé à Jean-Baptiste et François. Jean-Marie (Charles Berling), neveu du défunt, est fraîchement séparé de Claire (Valeria Bruni-Tedeschi), qui se confie à Catherine (Dominique Blanc). Celle-ci est la compagne de Thierry (Roschdy Zem), fils adoptif de Jean-Marie, qui a l’autorisation de transporter le cercueil de l’artiste dans son véhicule personnel, au grand étonnement de l’auto-stoppeur (Guillaume Canet), qui finira éjecté du véhicule.
Si les enterrements soudent les familles, celui-ci déchire davantage des êtres instables que rien ne viendra rapprocher. Des vacheries assénées par Lucie (Marie Daëms), amie fidèle ou ancienne maîtresse délaissée, aux humiliations subies par Bernard (Oliver Gourmet), peintre raté qui gravitait autour de Jean-Baptiste, tout n’est que trompe-l’œil et illusions. Le stress de Geneviève (Chantal Neuwirth), organisatrice du convoi, l’est sans doute autant à cause des problèmes matériels et humains que de son impossibilité à créer ne serait-ce qu’un semblant de courtoisie et d’humanité. Le film est découpé en deux parties (le voyage en train puis l’enterrement et sa suite), avec une structure d’œuvre chorale de plus en plus en fréquente depuis le succès de Short Cuts (Robert Altman, 1993), l’originalité de Chéreau étant de greffer cette convention à la structure d’un quasi huis clos. De son expérience théâtrale, Chéreau retient le foisonnement des personnages, chacun semblant entrer dans le champ comme s’il venait sur scène, et ce mélange de distanciation et de sur-expressivité. On appréciera à cet égard, au sein d’une distribution brillante, le jeu de Vincent Perez, étonnant en transsexuel, ainsi que la composition de Jean-Louis Trintignant, dans le double rôle du défunt et de son frère. Ceux qui m’aiment prendront le train fut sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes 1998, où il n’obtint aucun prix. Mais Chéreau gagna le César du meilleur réalisateur pour ce film sec et sans concessions, sans doute son plus abouti à ce jour.
– Césars 1999 : Meilleur réalisateur - Meilleure actrice dans un second rôle pour Dominique Blanc - Meilleure photo
– Étoiles d’Or 1999 : Meilleur réalisateur - Meilleur acteur pour Charles Berling - Meilleure révélation masculine pour Pascal Greggory
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