Le 17 mars 2025

- Acteur : Émilie Dequenne
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Révélée par les frères Dardenne, Émilie Dequenne était l’une des meilleures actrices du cinéma franco-belge. De Rosetta à Close, elle a comblé les spectateurs par des rôles intenses.
La révélation Rosetta
News : Émilie Dequenne devient célèbre du jour au lendemain en obtenant le prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes 1999 pour son impressionnante incarnation de Rosetta, des frères Dardenne, qui obtiennent la Palme d’or. Sa composition d’adolescente renfermée et obstinée prête à tout pour obtenir un petit boulot afin de survivre a été saluée à l’unanimité. Aux César, elle est pourtant battue par Audrey Tautou dans la catégorie du meilleur espoir féminin. Sa carrière a du mal à poursuivre son envol et elle doit se contenter d’un rôle figuratif dans Le pacte des loups de Christophe Gans, en 2001. Claude Berri la remet en selle en l’associant à Jean-Pierre Bacri dans Une femme de ménage, en 2002.
Un autre emploi de jeune femme défavorisée, qui lui vaut une seconde nomination aux César... toujours dans la catégorie espoir ! Il s’ensuit une série de films mineurs, à l’exception de L’équipier, une œuvre subtile de Philippe Lioret (2004, nomination au César du meilleur second rôle), dans lequel son personnage est toutefois en retrait par rapport à ceux de Philippe Torreton et Sandrine Bonnaire. En 2007, elle trouve un grand premier rôle grâce à André Téchiné qui lui fait jouer La fille du RER. Son jeu a gagné en maturité et elle incarne à merveille cette jeune mythomane voulant quitter l’univers de sa triste existence.
Une actrice immense et exigeante
Sans doute son activité théâtrale a-t-elle enrichi sa palette. Émilie Dequenne a en effet composé une éclatante Mademoiselle Julie sur les planches : les spectateurs qui ont pu la voir au Festival de Ramatuelle se souviennent de l’intensité de sa force dramatique. Une force tranquille, tant Émilie n’est pas obsédée par un plan de carrière et une présence médiatique régulière. Une autre belle prestation cinématographique est celle de la mère désœuvrée et dépressive d’À perdre la raison (2012) de Joachim Lafosse, succès public et critique, qui lui vaut les éloges de la profession. Émilie Dequenne ne cesse de tourner par la suite. Lucas Belvaux en fait une amoureuse mélancolique, employée modeste en couple avec un prof de philo (Loïc Corbery), dans la comédie romantique Pas son genre (2014) ; avant de la transformer en infirmière tentée par le militantisme d’extrême droite dans Chez nous (2017).
Et la comédienne se meut avec aisance dans des productions prestigieuses telles que Au revoir là-haut (2017) d’Albert Dupontel et Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait (2020) d’Emmanuel Mouret, qui lui permet de recevoir le César de la meilleure actrice dans un second rôle. On se souviendra aussi de ses dernières incarnations de figures maternelles, bienveillante dans Close (2022) de Lukas Dhont, ou inquiétante dans La fille d’Albino Rodrigue (2023) de Christine Dory. La maladie a emporté trop tôt cette actrice lumineuse et exigeante. Émilie Dequenne est décédée le 16 mars 2025 à l’âge de 43 ans.