Le 6 avril 2021
À travers le récit d’une jeune femme manipulée par un parti politique d’extrême droite, Lucas Belvaux reste fidèle à son cinéma social et offre un nouveau rôle en or à Emilie Dequenne.
- Réalisateur : Lucas Belvaux
- Acteurs : André Dussollier, Émilie Dequenne, Catherine Jacob, Anne Marivin, Guillaume Gouix
- Genre : Drame, Politique
- Nationalité : Français, Belge
- Distributeur : Le Pacte
- Durée : 1h58mn
- Date télé : 6 avril 2021 20:40
- Chaîne : OCS Choc
- Date de sortie : 22 février 2017
Résumé : Pauline, infirmière à domicile, entre Lens et Lille, s’occupe seule de ses deux enfants et de son père ancien métallurgiste. Dévouée et généreuse, elle est appréciée par ses patients qui comptent sur elle. Profitant de sa popularité, les dirigeants d’un parti extrémiste vont lui proposer d’être leur candidate aux prochaines municipales.
Critique : Lucas Belvaux avait atteint le sommet avec sa trilogie Un couple épatant/Cavale/Après la vie, modèle de déconstruction narrative et de montage. Les films qui ont suivi ont été plus classiques mais toujours marqués de son style, mélange de réalisme social et d’étude de mœurs. Le personnage de Pauline fait ainsi écho à d’autres protagonistes du cinéma de Belvaux, souvent des êtres équilibrés dont un moment de l’existence va ébranler le mode de vie et les certitudes. À l’instar du P.-D.G enlevé dans Rapt, du couple déstabilisé par les 38 témoins ou de la jeune amoureuse dans Pas son genre, l’infirmière de Chez nous doit affronter des dilemmes : le choix entre une vie sentimentale et une nouvelle carrière en politique, l’opposition entre les idéaux transmis par son père et les valeurs véhiculées par le parti politique qui l’a enrôlée, ou bien encore la contradiction entre son rôle de travailleuse sociale et les relents de xénophobie associés à sa nouvelle fonction.
- Copyright Synecdoche / Artémis Productions
On pourra juger le personnage bien naïf, au point de ne pas soupçonner que son amour de jeunesse (Guillaume Gouix) est un nazillon, ex-homme de main de l’extrême droite, et désormais « chasseur de réfugié ». L’arrivisme du docteur Berthier (André Dussollier), prêt à tout pour conquérir le pouvoir, est quasiment inscrit sur son front. Et quand la jeune femme applaudit un discours nationaliste prônant l’exclusion et la haine de l’étranger, le malaise s’empare du spectateur, tant l’infirmière bien sous tous rapports n’était pas censée adopter cette posture. Mais le scénario ne souffre pas pour autant de manque de crédibilité. Car l’aveuglement et le déni de Pauline, qui l’isoleront d’une partie de ses proches, sont une métaphore de la banalisation des thèses de l’extrême droite, usant de rhétorique pour se donner une image respectable et capter l’attention des classes moyennes. Et là, Belvaux réussit un troublant portrait de femme autant qu’un film humainement salutaire.
- Copyright Synecdoche / Artémis Productions
« CHEZ NOUS est un film engagé, oui. Il n’est pas militant pour autant, il n’expose pas vraiment de thèse. J’ai essayé de décrire une situation, un parti, une nébuleuse, de décortiquer son discours, de comprendre son impact, son efficacité, son pouvoir de séduction. De montrer la désagrégation progressive du surmoi qu’il provoque,libérant une parole jusqu’ici indicible. D’exposer la confusion qu’il entretient, les peurs qu’il suscite, celles qu’il instrumentalise », a ainsi déclaré le cinéaste. Il n’en oublie pas moins une démarche esthétique, comme l’attestent ces plans de campagne et de routes au début et à la fin du film, cadre géographique rural, dans lequel se joue ce théâtre de la cruauté. On sera aussi reconnaissant à Belvaux d’inscrire le cinéma social français dans une veine ouvertement politique, dans la lignée de Ken Loach, évitant les excès de certaines « fictions de gauche » (Dupont Lajoie), mais souhaitant toucher un large public. On regrettera juste certains passages outranciers (la scène avec Anne Marivin et son rejeton fasciste). Il faut enfin souligner un casting impeccable, dominé par Emilie Dequenne, une fois de plus touchante et nuancée, ainsi que Catherine Jacob, prodigieuse en clone de Marine Le Pen.
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nani 15 avril 2019
Chez nous - Lucas Belvaux - critique
un film déséquilibré , la première partie longue assez ennuyeuse raconte la vie quotidienne de Camille infirmière à domicile dans le nord . Au moment où j’allais partir , la seconde partie raconte la vie de Camille qui se laisse prendre dans la toile d’araignée de l’endoctrinement politique `. C’est prenant . Malgré tout , son jeu dans ce film est assez fade comparé à celui de Dussolier . Tout y est , l’amabilité , le semblant de liberté qu’il laisse à Camille au début , puis sa méthode devient brutale et autoritaire .Excellent interprétation dece grand acteur.