Le 21 février 2024
- Acteur : Micheline Presle
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Grande dame du cinéma français, star de l’après-guerre, active de 1937 à 2014, Micheline Presle a tourné avec les plus grands, d’Abel Gance à Alain Resnais, en passant par Becker, Autant-Lara, Losey… Elle vient de nous quitter à l’âge de 101 ans.
News : Micheline Presle nous a quittés et c’est une grande tristesse pour les cinéphiles qui ont apprécié cette actrice lumineuse, l’une des meilleures de sa génération, et mémoire du cinéma français.
Le vedettariat des années 40 et 50
Micheline Presle débute au cinéma en 1937 et devient très vite une jeune première remarquée, dirigée par Georg Wilhelm Pabst dans Jeunes filles en détresse (1939). Les années 40 la voient devenir grande vedette du cinéma. Avec Danielle Darrieux et Michèle Morgan, elle forme « Les trois glorieuses », selon l’expression du journaliste Henry-Jean Servat. Son talent dramatique et sa beauté sont appréciés dans le mélodrame Paradis perdu (1940) d’Abel Gance, le drame Félicie Nanteuil (1942) de Marc Allégret, la romance onirique La nuit fantastique (1942) de Marcel L’Herbier, mais aussi le drame satirique Boule de suif (1945) de Christian-Jaque, d’après deux nouvelles de Maupassant. Elle trouve les meilleurs rôles de cette période sous la direction de Jacques Becker et Claude Autant-Lara. Pour le premier, elle est exquise dans le drame romanesque Falbalas (1944), situé dans le monde de la haute couture. Pour le second, elle est à jamais Marthe dans Le diable au corps (1947), d’après le roman de Raymond Radiguet, avec Gérard Philipe, alors débutant, et que Micheline Presle avait réussi à faire engager. Ce récit de l’épouse d’un militaire au front qui noue une relation amoureuse avec un lycéen suscite le scandale dans la presse de droite et au sein de l’armée, mais vaut un triomphe à ses deux interprètes.
Hollywood propose alors un contrat à Micheline Presle. L’actrice rejoint les studios, mais sa carrière américaine est décevante et elle ne fait rien de marquant, à l’exception de Guérillas (1950), « le plus mauvais film de Fritz Lang » selon Pierre Rissient. Aux États-Unis, elle épouse le réalisateur William Marshall, ex-époux de Michèle Morgan, et père de sa fille, la réalisatrice et actrice Tonie Marshall (1951-2020).
De retour en France en 1953, Micheline Presle se maintient en tête d’affiche mais ne retrouve pas son statut bankable de l’après-guerre. Pourtant, elle bouleverse dans L’amour d’une femme (1954) de Jean Grémillon. Dans ce beau film féministe, en avance sur son temps, elle incarne une femme médecin qui s’installe sur une île bretonne, et doit faire face à un dilemme professionnel et sentimental. Mais le métrage est un échec, un de plus pour l’un des grands cinéastes français maudits. Des années 50, on peut retenir aussi sa composition de Madame de Pompadour dans Si Versailles m’était conté (1954) de Sacha Guitry (un parterre de stars est au générique, mais seule la photo de Micheline Presle est sur l’affiche officielle), et le polar britannique L’enquête de l’inspecteur Morgan (1959) de Joseph Losey. Elle tourne aussi à Cinecittà, mais dans des bandes mineures signées Carmine Gallone ou Riccardo Freda.
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Micheline Presle, grande dame à la filmographie impressionnante
Dans les années 60 et les décennies qui suivent, Micheline Presle est toujours très présente dans le cinéma français, mais désormais davantage pour des seconds rôles, et alterne films d’auteur et cinéma commercial. Elle donne la réplique à Jean Gabin dans Le baron de l’écluse (1960), de Jean Delannoy, qui l’avait déjà dirigée dans le très moyen Les jeux sont faits (1947), sur un scénario de Jean-Paul Sartre. On peut la préférer en maîtresse ambiguë de Mastroianni dans L’assassin (1961) d’Elio Petri, en mère supérieure bienveillante dans La religieuse (1966) de Jacques Rivette, ou en maquerelle internée dans le méconnu roi de cœur (1967) de Philippe de Broca. Cette seconde partie des années 60 la voit connaître un regain de popularité, avec le triomphe de la série télévisée Les saintes chéries (1965-70), où elle a pour partenaire Daniel Gélin.
Les années 70 et 80 la voient multiplier les seconds rôles : reine rouge dans Peau d’âne (1970) de Jacques Demy, comtesse dans Le diable dans la tête (1972) de Sergio Sollima, galeriste dans En haut des marches (1983) de Paul Vecchiali, faiseuse d’anges dans Le sang des autres (1984) de Claude Chabrol, ou mère de Depardieu dans I Want to Go Home (1989) d’Alain Resnais, pour lequel est nommée au César de la meilleure actrice dans un second rôle. En même temps, le jeune cinéma français la réclame et elle se retrouve en tête d’affiche pour des films d’auteur, dont Certaines nouvelles (1980) de Jacques Davila, Beau temps mais orageux en fin de journée (1986) de Gérard Frot-Coutaz, Le jour des rois (1991) de Marie-Claude Treilhou (dans un double rôle) ou Je m’appelle Victor (1992) de Guy Jacques.
De 1994 à 2014, on la voit aussi dans des films de sa fille Tonie Marshall, de Pas très catholique à Tu veux ou tu veux pas, en passant par le célèbre Vénus Beauté (Institut), en 1999. Au cours des deux dernières décennies de sa carrière, elle est également dirigée par Francis Girod, Jean-Claude Biette, Merzak Allouache ou Hugo Gélin, et remplace au pied levé Danielle Darrieux dans Hitler à Hollywood (2011) de Frédéric Sojcher. Micheline Presle a eu également une brillante carrière à la scène, tant à l’aise dans le classique que le boulevard ou le café-théâtre, et collaborant avec des metteurs en scène aussi divers que Pierre Dux, Jean Meyer, Franco Zeffirelli, Jacques Charon, Jérôme Savary et Jean-Luc Tardieu. En 2004, elle a reçu un César d’honneur. Micheline Presle atteint les cent ans le 22 août 2022.
La grande actrice est décédée le 21 février 2024.
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