« On arrête tout, on réfléchit. »
Le 14 janvier 2015
Écrite par Gébé, d’après sa BD, cette farce mêlant avant-garde et esprit corrosif post-soixante-huitard est emblématique de l’esprit de subversion du début des années 70. Cabu et Wolinski, mais aussi Coluche, Depardieu ou Dewaere font partie d’une distribution hilarante.
- Réalisateurs : Alain Resnais - Jacques Doillon - Jean Rouch
- Acteurs : Gérard Depardieu, Miou-Miou, Coluche, Cabu, Georges Wolinski
- Genre : Comédie, Noir et blanc
- Nationalité : Français
- Distributeur : L.C.J. Éditions et Productions
- Durée : 1h27mn
- Date de sortie : 22 février 1973
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Résumé : Le film narre un abandon utopique, consensuel et festif de l’économie de marché et du productivisme. La population décide d’un certain nombre de résolutions...
Critique : Premier long métrage de Jacques Doillon, L’an 01 est d’abord un film collectif, même s’il porte la marque du dessinateur Gébé, qui a adapté ici sa propre BD. Les noms d’Alain Resnais et Jean Rouch sont crédités au générique. Le premier, qui se trouvait à Manhattan au moment du tournage, est l’auteur de l’hilarante séquence se déroulant à Wall Street, qui voit les financiers se défenestrer par un effet visuel très cartoonesque. On ressent ici l’amour de Resnais pour la bande dessinée, qui préfigure La vie est un roman et surtout I want to go home. Le second, apôtre du cinéma-vérité, signe le bref volet africain évoquant la répercussion de l’annonce de la grève des Français dans les pays du tiers-monde. Une certaine thématique de la domination des pays du Nord sur ceux du Sud est ici explicitement mais brièvement mise en exergue. Si Doillon est le maître d’œuvre officiel, il apparaît davantage comme coordinateur, le futur auteur des Doigts dans la tête ne dévoilant pas vraiment son style personnel. Mais il y greffe déjà certaines de ses préoccupations, comme les aléas de l’amour et les turpitudes de la révolte. L’an 01 est en fait au cinéma ce qu’une coopérative est au monde du marché : une entreprise artisanale portée par une petite communauté, sans que personne ne tire la couverture à soi, avec le souffle de valeurs communes.
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On pense à un certain cinéma engagé, lisible au premier ou second degré, de La vie est à nous (1936) de Jean Renoir à Camarades (1970) de Marin Karmitz, en passant par les expériences de type Cinétract qui voyaient déjà mobilisés Resnais mais aussi Godard ou Marker. S’y rattache donc cette fable (et farce) à l’esprit très soixante-huitard, déstructurée dans sa forme, au minimalisme assumé (noir et blanc, décors...), et surtout insufflée de l’air du temps du début des seventies : contestation de la croissance, du productivisme, de l’autorité d’entreprise, de la pollution ; et promotion d’une joyeuse liberté aux parfums de l’amour libre, de la paix, et d’un bordel ambiant... L’aspect avant-gardiste du projet est tempéré par un ton et un humour café-théâtre qui permirent aux auteurs de viser une audience plus large que celle des initiés. Et c’est avec jubilation que l’on découvrira les débuts à l’écran de Balasko, Jugnot ou Coluche, réunis autour de pittoresques seconds rôles (Jean-Paul Farré, Jean-Pierre Sentier), mais aussi de Depardieu, Dewaere et Miou-Miou, le futur trio vedette des Valseuses. Découvrir L’an 01 est donc se replonger avec délices dans toute une époque de savoureuse subversion, qu’amplifie la présence dans la distribution de Georges Wolinski et Cabu, ce dernier campant un conspirateur en réunion, dans une scène rétrospectivement émouvante. En dépit de ses imperfections et de son caractère forcément daté, L’an 01 est donc une vraie curiosité de cinéphile.
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