Paroles et musiques
Le 20 janvier 2021
Le plus gros succès d’Alain Resnais est une très subtile comédie chorale, bien servie par le scénario et les dialogues de Jaoui-Bacri.
- Réalisateur : Alain Resnais
- Acteurs : Sabine Azéma, André Dussollier, Jean-Pierre Bacri, Agnès Jaoui, Pierre Arditi, Lambert Wilson, Jane Birkin
- Genre : Comédie dramatique, Musical
- Nationalité : Français
- Distributeur : Pathé Distribution, AMLF Distribution
- Durée : 2h00mn
- Date télé : 20 janvier 2021 23:00
- Chaîne : France 2
- Date de sortie : 12 novembre 1997
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Résumé : Suite à un malentendu, Camille s’éprend de Marc Duveyrier. Ce dernier, séduisant agent immobilier et patron de Simon, tente de vendre un appartement à Odile, la sœur de Camille. Odile est décidée à acheter cet appartement malgré la désapprobation muette de Claude, son mari. Celui-ci supporte mal la réapparition après de longues années d’absence de Nicolas, vieux complice d’Odile qui devient le confident de Simon.
Critique : On connaît la chanson est la seconde collaboration d’Alain Resnais avec Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, après Smoking et No smoking. Le couple de scénaristes et dialoguistes a apporté au cinéaste un humour et une légèreté que l’on décelait peu dans l’univers austère du réalisateur d’Hiroshima mon amour, même si Mon oncle d’Amérique recelait les prémices d’une fantaisie. Interactivement, Resnais glisse de la profondeur et insuffle une mise en abyme dans le texte des auteurs d’Un air de famille, dont on retrouve ici le goût pour la description des rapports conjugaux, filiaux et fraternels. Mais si on rit beaucoup à ce petit théâtre de hasards et coïncidences, la mélancolie et les situations dramatiques n’y sont pas absents. Camille (Agnès Jaoui) est dépressive et ses malaises révèlent une blessure profonde, Nicolas (Bacri) est hypocondriaque, Marc (Lambert Wilson) est un escroc immobilier doublé d’un mufle. Claude (Pierre Arditi) et Jane (Birkin) veulent quitter leurs conjoints respectifs. Quant à Odile (Sabine Azéma), elle trahit un jeune père de famille au chômage pour embaucher le frère de Nicolas... Sous des allures de comédie chorale divertissante, On connaît la chanson comporte aussi les thèmes d’Alain Resnais, à commencer par la référence à la mémoire et à l’Histoire : celle-ci apparaît par le biais de l’activité de guide touristique de la doctorante, auteur d’une thèse sur « Les chevaliers-paysans de l’an mil au lac de Paladru », et qui attire l’attention de son groupe sur le personnage de von Choltitz (Götz Burger) refusant d’exécuter l’ordre d’Hitler et de détruire Paris. Mais c’est la structure même du film qui s’insère dans la démarche de Resnais. Les chansons ont ici le même rôle leitmotiv que les interventions récurrentes du professeur Henri Laborit dans Mon oncle d’Amérique ou les flocons de neige dans L’amour à mort. Elles permettent une mise à distance de personnages exhibés par leur metteur en scène et marionnettiste, qui n’hésite pas, en outre, à glisser de déroutants effets visuels, à l’instar de ces méduses géantes apparaissant à l’écran lors de la crémaillère d’Odile.
Mais revenons aux chansons. Resnais a souhaité retrouver le ton de certaines comédies populaires des années 30 et 40, quand Danielle Darrieux ou Albert Préjean interrompaient l’action pour fredonner d’aimables ritournelles, comme cela fut le cas de La crise est finie à Premier rendez-vous. Mais à l’exception de Jane Birkin, aucun acteur du film n’est ici chanteur et les auteurs les font chanter en playback. À la différence du cinéma de Demy, il ne s’agit pas de les doubler par des professionnels de l’art vocal mais d’écouter de brefs extraits de tubes célèbres, censés refléter leurs états d’âme ou intentions. Assis en plan fixe face à la caméra, Simon (André Dussollier) et Nicolas chantent ainsi Avoir un bon copain, refrain mis à la mode par Henri Garat dans Le chemin du paradis (1930), premier film musical français. « Résiste ! » conseille Odile à sa sœur, l’extrait de France Gall illustrant sa combativité. Contrairement aux radios nostalgiques pour lesquelles la chanson française débute seulement dans les années 60, les auteurs n’oublient pas Maurice Chevalier, Arletty ou Jean Aquistapace, dont les rengaines forment ici un pot-pourri éclectique avec les textes et musiques de Julien Clerc, Léo Ferré ou Téléphone... Et la subtilité dans l’utilisation des chansons est telle que celles-ci finissent par être guettées et se font entendre là où on ne les attendait pas, tel un gag narratif. Entouré de techniciens brillants (Renato Berta à la photo, Hervé de Luze au montage), Alain Resnais se montre, comme à son habitude, un esthète inspiré, filmant Paris avec le même amour que Woody Allen cernant Manhattan. Gros succès public, le film remporta sept César dont celui du meilleur film, du meilleur scénario, du meilleur acteur (André Dussollier), et des meilleurs seconds rôles (Jaoui et Bacri). Alain Resnais, déjà lauréat de deux trophées du meilleur réalisateur par le passé, dut quant à lui s’incliner devant Luc Besson pour Le cinquième élément...
– Césars 1998 : Meilleur film - Meilleur acteur pour André Dussollier - Meilleure acteur dans un second rôle pour Jean-Pierre Bacri - Meilleure actrice dans un second rôle pour Agnès Jaoui - Meilleur scénario - Meilleur son - Meilleur montage
– Prix Louis Delluc 1997
– Syndicat Français de la Critique de Cinéma 1997 : Prix du meilleur film
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