Le 11 septembre 2024
- Réalisateur : Valérie Donzelli
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Festival : Festival d’Angoulême 2024
La cinéaste récemment césarisée pour son adaptation de L’amour et les forêts, coécrit avec Audrey Diwan, était à l’honneur au Festival du Film Francophone d’Angoulême. Le film sort en salles le 18 septembre.
L’occasion pour la réalisatrice de revisiter sa filmographie avec le public angoumoisin qui a également pu découvrir son premier documentaire, Rue du Conservatoire. Elle y suit une joyeuse bande d’apprentis comédiens passionnés lors de leurs dernières semaines de cours, à quelques jours de la présentation de leur spectacle de fin d’année. Une œuvre portée par une énergie et une force de vie propres à Valérie Donzelli, qui témoigne de son travail sur cette nouvelle création.
Vous avez déclaré avoir tenté deux fois le concours d’entrée au Conservatoire… et y avoir échoué deux fois… Vous n’étiez donc pas rancunière à l’idée d’y revenir ?
Je ne suis pas du tout rancunière d’une manière générale. Ce projet est né de ma rencontre avec les élèves du Conservatoire lors d’une masterclass sur la direction d’acteur au cinéma que j’ai pu animer avec eux. Il est vrai que je ne pensais jamais revenir sur ce lieu et encore moins pour y enseigner le jeu d’acteurs au cinéma car, à l’époque, je ne pensais tout simplement pas qu’un jour, je pourrais mettre les pieds sur un plateau. Je leur ai dit, en toute modestie, que j’incarnais la réussite de quelqu’un qui a tout raté (rires). Je n’ai aucun diplôme, hormis le bac et le permis de conduire.
Mais alors comment avez-vous percé dans le cinéma ?
J’ai passé peu d’auditions, mais je les ai quasiment toutes réussies. Tout est allé si vite, je suis entré au Conservatoire du Xe arrondissement, puis j’ai joué dans un court métrage qui m’a permis d’avoir un agent et d’obtenir d’autres rôles. Puis ma rencontre avec Jérémie Elkaïm a été évidemment un tournant important dans ma vie puisqu’il m’a incitée à écrire. Et évidemment, la maladie de mon fils a radicalement changé ma vie et m’a poussée à raconter mes histoires et à faire mes propres films.
- © 2024 Rectangle Productions. Tous droits réservés.
Et qu’est ce qui a motivé cette première incursion dans le documentaire ?
Je voulais saisir l’énergie vitale de cette jeunesse. C’était d’autant plus nécessaire à ce moment précis de ma vie où je ne suis plus vraiment jeune puisque j’ai fait ce film à cinquante ans. Aujourd’hui, j’ai conscience de ce qu’est la jeunesse alors qu’à vingt ans, c’était mon état, ma vie. Tourner ce film m’a fait l’effet d’une cure de jouvence tant c’était joyeux.
Quel processus de création implique un tournage comme celui-ci ?
Le tournage s’est déroulé dans une improvisation permanente. Il fallait que chacun se sente le plus libre possible. Ce sont les élèves qui m’imposaient leur rythme. Il fallait que je sois attentive à tout ce qui se passait autour de moi. J’ai préalablement posé un cadre de travail car notre budget nous a incités à ne tourner que deux ou trois jours par semaine durant cinq semaines et avec une équipe réduite, composée de seulement un chef opérateur, un ingénieur du son et une assistante.
Il y a une scène assez saisissante dans votre film : quand vous interrogez chaque apprenti comédien sur ce qu’il compte faire après la fin des cours, avec ce que cela implique comme incertitudes, comme risques…
Bien sûr. C’est un métier si incertain et qui n’est d’ailleurs pas considéré comme un métier tant que l’on n’est pas connu et que l’on ne gagne pas d’argent. Or, au Conservatoire, ils peuvent exercer leur métier en toute liberté. Mais quand ils sortent, ils ne savent pas forcément où trouver du travail, ce qui les met dans un état d’anxiété car ils ont besoin de gagner leur vie. Mais quand on n’est pas connu, il est difficile de trouver des rôles importants et d’exister. Les statistiques tendent à prouver que seulement 10 % des élèves travailleront durablement.
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Lors du Festival d’Angoulême, vous avez eu l’occasion de représenter vos œuvres en salles. De vos plus grands succès, comme La guerre est déclarée ou L’amour et les forêts, à vos expériences plus douloureuses comme Marguerite et Julien. Avec du recul, comment expliquez-vous que ce film, si beau au demeurant, ait reçu un accueil si cruel de la part de la presse ?
Je ne comprends toujours pas ce qui s’est passé. De ce point de vue, le Festival d’Angoulême a été une expérience magnifique car les spectateurs sont venus en nombre pour (re)découvrir ce film. Ils m’ont dit qu’ils étaient bouleversés et ne comprenaient pas les critiques déchaînées qu’il a suscitées. C’est ça aussi le cinéma, les journalistes ont le droit de se tromper. C’était il y a dix ans, la presse était menacée, les réseaux sociaux étaient quant à eux en plein essor, et les journalistes avaient besoin d’exister, en utilisant des mots forts. Cependant, je reconnais que le film reste complexe, voire irrévérencieux. Je comprends donc qu’il puisse susciter une forme de gêne.
Vous alternez l’interprétation et la réalisation mais on sent que vous travaillez plus souvent à la création de vos œuvres car vos apparitions à l’écran se font rares.
Aujourd’hui, je me sens pleinement réalisatrice. Même si j’adore toujours autant jouer la comédie. Mais j’en ai moins l’occasion. Mes films me prennent du temps. Cependant, j’ai récemment joué dans un long métrage de Grégory Magne, Les musiciens, avec Frédéric Pierrot, qui sortira l’année prochaine.
Vous vous êtes désormais consacrée à tous les formats possibles, du court au long métrage en passant par ce documentaire et votre série Nona et ses filles. Qu’avez-vous appris de ces expériences si variées ?
Toutes ces expériences ont été très heureuses et bénéfiques pour moi mais le tournage de Nona et ses filles a été incroyablement enrichissant. C’est comme si j’avais mis en scène trois films à la suite en un temps record de tournage, et tout en jouant dedans. Un projet difficile certes, mais passionnant. Même s’il s’agissait d’une série, je l’ai abordée et réalisée comme un film, avec un haut niveau d’exigence artistique. Comme je dis souvent, je ne fais jamais de télévision, toujours du cinéma.
Propos recueillis par Nicolas Colle
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