Histoire d’évasion
Le 3 mars 2006
Un projet mené à bien avec de jeunes détenus et qui aboutit à un bel objet musical.
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Un projet mené à bien avec de jeunes détenus et qui aboutit à un bel objet musical.
Trop de peine(s) en silence est le résultat étonnant et bouleversant de l’action artistique A corps mineurs menée en 2001 par l’association Pulsart avec une vingtaine d’adolescents incarcérés auxquels des artistes sont venus prêter main forte, dont Amadou et Mariam, Lo’jo, Noir Désir, Rodolphe Burger, Sergent Garcia, Les Têtes Raides... Le projet s’inscrit dans la même perspective que d’autres menés par Klavdij Sluban (lire notre article) dans le domaine photo, qui consistent à concevoir un travail partagé entre artistes et détenus pour aboutir à une extraction temporaire de l’univers carcéral. Si cette initiative ne peut être qu’encouragée a priori, à l’écoute du disque Trop de peine(s) en silence, on en est plus que convaincu. L’album s’ouvre sur des bruits d’écrou et des voix fantomatiques dans lesquelles on devine tour à tour le maton et le prisonnier. Ce titre s’intitule B-zéro, façon de dire qu’après ces cinquante et une secondes de bruitages du passé, il s’agit d’aller de l’avant et de s’extraire de l’univers carcéral en exprimant ce que, dans la promiscuité d’une cellule, il est impossible de révéler : les actes manqués, les faiblesses, et les déclarations d’amour.
Les chants offrent la part belle à la culture rap (Trop de peine(s) en silence) et ragga (Mieux que personne). Mais au-delà des styles, il s’agit de textes psalmodiés, de prières laïques ou religieuses. La musique accompagne ces psaumes d’airs hypnotiques et lancinants, proches de ceux de Massive Attack pour certains titres comme Paradis, avec une ligne de basse très sombre adoucie par des notes d’accordéon et de saxo, ou Mama dans lequel on sent la touche Burger avec un delay oppressant sur la voix et une structure en boucle. De petits arrangements bien placés accroissent le malaise : dans Grandir en paix, c’est un air de flûte obsédant, et dans Trop de peine(s) en silence, c’est la mélodie d’une boîte à musique. La dureté des paroles peut être allégée par la présence de rythmes africains plus entraînants. Il en va ainsi de l’afro beat de Fils d’immigré, des références tribales d’Ainsi va la vie chanté par Denis Péan, de Mieux que personne accompagnée par Sergent Garcia, ou de la touche d’Amadou et Mariam sur le sautillant Akilo. Les artistes jouent leur rôle de tuteurs, ils marquent les morceaux de leur style mais toujours au profit des paroles, majoritairement écrites par les adolescents, et de l’unité de l’album. Au final, ces détenus ont accouché d’un bel objet présenté dans un coffret avec photos et paroles, et d’une rare puissance émotionnelle.
Trop de peine(s) en silence devait être initialement commercialisé, afin de toucher le plus grand nombre et de recueillir de l’argent pour alimenter un fonds de soutien pouvant financer d’autres actions. Pour des raisons juridiques, les enfants étant mineurs, cette démarche n’a pu s’accomplir ; donc, pour soutenir cette initiative et la diffusion de l’album, il suffit d’envoyer un don à Pulsart et, en échange, l’association envoie le CD gratuitement.
Trop de peine(s) en silence - B-zéro (Pulsart)
Tracklisting :
1 B-zéro
2 Fils d’immigré
3 Trop de peine(s) en silence
4 Un minimum sons africains
5 Ainsi va la vie
6 Akilo grosse
7 Paradis "ça sent la fin du monde"
8 Mieux que personne
9 Grandir en paix
10 Neuf mois
11 Mama
12 Chantal est la rose
13 Fille du ghetto
14 Même heure
15 24/24
16 La peur de l’amour
17 Malika
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