Notre avis : Pour les enfants Carré, rêver est difficile dans un monde où les adultes cloisonnent les idées, dictent les conduites, limitent l’imagination. Ses deux frères et elle, grandissent et évoluent dans un univers où la parole ne prête pas à débat, où la délicatesse maternelle n’existe pas et où toutes les ambitions se voient contrariées.
Les adultes empêchent aux enfants de croire en leur rêves les plus forts en les décourageant absurdement. Le frère aîné d’Isabelle veut devenir pilote, ses parents l’assurent que ce n’est pas mieux que d’être chauffeur de bus... et que ce n’est pas un métier pour lui.
Pourtant, pour Isabelle, malgré l’acidité, la souffrance et les doutes laissés par les blessures de l’enfance, choisir sa vie et la vivre comme on l’entend, semble être une priorité.
Elle en témoigne jusque dans son écriture fluide, délicate, d’une légèreté planant par-dessus les fracas passés. Simple, elle illumine et dispense du bon sens : Mon sourire ne se force plus aujourd’hui, il sourit s’il en a envie. Cela semble une évidence. Mais d’autres savent comme moi combien cela peut demander de temps, une lente et silencieuse révolution.
Elle affirme avec la grâce de ceux qui ont subi des épreuves, la possibilité de réussites sur l’infini et difficile chemin de la conquête de soi, sous réserve d’une fidélité sans faille à l’espoir le plus profond.

Accepter les changements, ceux des autres mais également les siens, qu’il faut à l’inverse de l’éducation qu’elle a subi, choisir de soutenir.
Isabelle fait le choix de soutenir son père lorsqu’il avoue son homosexualité. Comme ses frères, elle ne le renie ou ne le juge pas, elle ne cherche même pas à comprendre ou à avoir des explications, elle accepte en essayant de ne pas bouleverser leur lien.
Dans cette histoire, où les parfums et les décors ont une grande importance, l’espoir et la crainte se côtoient, s’entremêlent, laissent diverses issues possibles. Chacun est libre, sans penser l’être vraiment. Chacun réfléchit, se questionne, cherche et trouve des solutions afin d’apaiser, de se retrouver, ou plutôt, de se trouver.
Isabelle Carré nous invite à nous questionner, à oser dire les choses, qu’elles soient positives ou négatives, se les avouer et de les avouer aux autres au premier bénéfice de notre paix intérieure.
A l’écouter parler de son livre, de ce chemin qui l’a menée à tant de tolérance, d’écoute et d’empathie, on s’émeut de la tendresse de son regard et de sa voix, touchante et douce, qui ont fait son succès de comédienne et désormais celui de romancière.