Dans la cage de verre
Le 16 décembre 2010
Glacial et brûlant, le troisième film de Christoph Hochhäusler, violente histoire d’amour et de pouvoir située dans le monde du grand capitalisme, impressionne par la netteté sans bavure de l’écriture cinématographique et du discours politique.
- Réalisateur : Christoph Hochhäusler
- Acteurs : Robert Hunger-Bühler, Nicolette Krebitz, Mark Waschke
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand
- Titre original : Unter dir die Stadt
- Date de sortie : 15 décembre 2010
- Plus d'informations : http://www.soustoilaville-lefilm.com/
- Festival : Festival de Cannes 2010, Festival du cinéma allemand
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Glacial et brûlant, le troisième film de Christoph Hochhäusler, violente histoire d’amour et de pouvoir située dans le monde du grand capitalisme, impressionne par la netteté sans bavure de l’écriture cinématographique et du discours politique.
L’argument : Roland, un banquier influent installé au sommet d’une tour d’un quartier d’affaires, rencontre par hasard Svenja lors d’une exposition d’art contemporain. Cet homme de pouvoir est violemment attiré par la jeune femme, dont l’époux travaille pour lui, à un étage inférieur...
Notre avis : Christoph Hochhäusler, né en 1972, est un des fondateurs de la revue Revolver et son analyse de la pratique cinématographique est fine et précise, qu’il s’agisse de celle des autres ou de la sienne propre. Il affectionne la confrontation avec le public et c’est avec une assurance tranquille (au moins en apparence) qu’il s’est livré à l’exercice lors de la séance de clôture du Festival du Cinéma allemand à l’Arlequin, où Unter dir die Stadt - Sous toi la ville était projeté en avant-première.
Cette même impression de fermeté du discours, tant esthétique que politique, se dégage de la vision du film, tourné en août-septembre 2009, qui nous emmène dans la City de Francfort et le monde de la haute finance.
Du sommet de leur tour de verre qui surplombe la ville, les décideurs vivent dans un univers abstrait dont le directeur de la photo, Tim Pannen, a accentué l’irréalité en utilisant (pour le bureau de Roland) des tapis blancs. Tels les joueurs d’une partie d’échecs sur-dimensionnée, ils sont obnubilés par leurs stratégies, leurs luttes d’influence, et n’ont plus qu’une conscience vague des répercussions concrètes (sociales, politiques, humaines) de leurs mouvements de pions sur l’échiquier de l’économie globalisée.
Mais la ville du bas est bien là et exerce l’irrésistible attirance du réel. Roland, l’homme de pouvoir, est mû par le désir de sortir de son rêve, de se réveiller. On le voit se faire emmener par son chauffeur dans un squat pour observer un junkie en train de se piquer. Il s’invente une autre vie, fils d’un ouvrier de BASF, et glisse une photo de lui enfant dans l’embrasure d’une porte de l’appartement de prolétaires qu’il visite à Mannheim.
Mais c’est surtout son attirance pour Svenja qui va faire basculer son existence. Leur amour, basé sur l’histoire de David et Betsabée, est filmé comme un jeu du chat et de la souris, un conflit de pouvoir, chacun cherchant à déstabiliser l’autre, son miroir, pour le perdre et se perdre avec lui. Incarnant magnifiquement ces deux guerriers nihilistes, Robert Hunger-Bühler et Nicolette Krebitz sont étonnants d’opacité butée et de violence rentrée.
Car Hochhäulser , admirateur d’Hitchock dont le Marnie est explicitement cité, refuse de percer la surface lisse des apparences. Mais ce détachement permet au spectateur de se reconnaître dans les pantins tragiques de Unter dir die Stadt qui acquièrent une dimension humaine tragique sans passer par la psychologie.
Chaque scène de ce conte moderne, évoquant de loin Metropolis, a un enjeu dramatique véritable et possède une charge visuelle très forte. Le spectateur ne devrait pas en sortir tout à fait indemne, d’autant qu’il s’achève sur une menace de révolution qui est aussi un espoir.
Après Milchwald - Le bois lacté et Falscher Bekenner - L’imposteur, ce nouvel opus vénéneux confirme la stature de Hochhäusler, un des représentants majeurs de la Nouvelle Vague Allemande qui ne cesse, au fil des ans, de nous surprendre avec des propositions cinématographiques radicales et passionnantes.
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