Le voyage de Shuna - Hayao Miyazaki - la chronique BD

Critique : En découvrant ce magnifique album, alors même que sort son dernier film Le garçon et le héron, les admirateurs du grand maître Miyazaki ne pourront que se réjouir : ils auront entre les mains un inédit qui leur fera revivre les oeuvres passées tout en leur apportant un conte splendidement orchestré. En effet, il y a du Princesse Mononoke dans cet album, avec ce prince parti sur son Yakkuru seul pour protéger les siens, mais aussi du Nausicaa, avec ce monde battu par des vents stériles et moisi par des humains avides de pouvoir ou de nourriture, sans oublier les Contes de Terremer, avec ces décors et vêtements du Moyen-Âge mêlées aux techniques de la Renaissance. Ces références internes séduiront les fans sans rebuter les néophytes. Dans ce manga qui ressemble à un livre de contes anciens, la technique narrative est simple, efficace à l’extrême, se contentant de petits paragraphes qu’un Perrault aurait volontiers pris, qu’un Maupassant aurait voulu copier, pour donner une histoire faite de péripéties ordonnées et de messages pour la jeunesse non dissimulés.

© Sarbacane / Miyazaki

Dans ces aquarelles féériques, même si les décors sont d’un sombre post apocalyptique, certains épisodes rappelant davantage La Route que Le Voyage de Chihiro, on retrouve une humanité prête à tout, des pillards cannibales aux marchands d’esclaves, pour finalement arriver à un jardin préservé, lui aussi avec des éléments dignes d’un Edena de Moebius qui aurait croisé le Dieu Cerf de Mononoke. Miyazaki ne livre pas seulement une histoire pour enfants mais bien un conte puissant, qui ne s’effraie pas de montrer des choses tragiques, qui s’applique encore et toujours à démonter l’orgueil humain face à la simplicité de la Nature.

© Sarbacane / Miyazaki

Conte en forme de fresque rassemblant toutes ses idées passées pour en extraire un nouveau suc merveilleux, Le Voyage de Shuna fait à nouveau vibrer le lecteur et admirateur de Miyazaki, mais pas seulement.