Rêveries - La chronique BD

Déambuler dans Paris n’est pas un thème nouveau, mais quand c’est un auteur chinois qui s’y colle, cela a forcément une saveur nouvelle. Attention, car l’auteur le dit lui-même, il a une influence européenne forte, et il n’y a pas de pseudo ambiance que l’on pourrait imaginer orientale, mais plutôt une vaste nostalgie pour des lieux, des figures, des rêves qui n’appellent aucune nationalité, aucun genre, aucun âge. En effet, c’est plutôt un passionné romantique qui prend le large, qui se laisse porter, et qui aurait donné vie à quelques nouvelles censées se croiser, à quelques mondes personnels et imaginaires qui convergeraient vers Paris, le temps de quelques jours, quelques heures d’une nuit étrange, calme et voluptueuse. Pas la peine d’accorder vraiment de sens ou de s’attarder sur la construction d’une ou des histoires, l’essentiel est ailleurs : se laisser bercer par ce regard neuf, un peu naïf mais surtout naturel.

Golo Zhao / Casterman

Ce regard se transcrit dans un graphisme lui aussi en décalage, un peu rétro, côté art déco mais vieilli, comme si le doré avait pris un coup de vieux, comme si les monuments étaient devenus des reliques. Et pourtant, il y a de la vie partout, avec ses expressions, comme de l’impressionnisme par moment, du Hopper dans d’autres, et surtout un style incroyable, comme si le papier avait été frotté délicatement, à l’aide de crayons sépias et d’un noir anthracite très doux. Il n’y a pas de recherche pure et dure de contraste, bien au contraire tout s’inscrit dans une même logique, celle de laisser le rêve prendre forme, s’étaler tout au long de l’album sans pour autant prendre le pas à chaque fois sur le réel, le jour, la rue.

Golo Zhao / Casterman

Expérience enrichissante et tranquille, Rêverie de Golo Zaho fait découvrir un autre Paris, peut-être davantage proche de celui de Debussy, et surtout une autre approche, où le lecteur peut se laisser aller à dériver sans chercher le fil de la narration, mais seulement la poésie des pages.