Le 8 septembre 2015
- Date de sortie : 1er juin 2015
Lyon BD, pour ses dix ans, a sorti les grands plats. Enfin, vu la richesse du festival en temps normal, ce challenge a été assez difficile à tenir. Néanmoins, comme chaque année, Lyon BD nous a offert moult rencontres, spectacles, expositions, activités autour de la BD.
Nous allons nous attarder sur trois formes de rencontres que nous proposait ce sympathique festival.
Sur une même journée, vous pouviez aller écouter Boulet – l’auteur entre autres des Notes tirées de son blog -, Trondheim – l’auteur des Petits Riens, de Ralf Hazam et moult autres BD non tirés de son blog – et Hub – l’auteur de Okko, BD médiévale nippone fantastique qui s’est achevée avec son dixième tome -.
Bien sûr, avec Boulet au Théâtre Odéon, Trondheim à l’Opéra de Lyon et Hub au Palais de la bourse, il fallait avoir de bonnes jambes et l’envie d’être sportif, mais ce triple rendez-vous reflète les efforts du festival pour présenter des auteurs de BD autrement.
Tout d’abord, Boulet au théâtre Odéon. Une rencontre mise en scène, plongée dans le noir, avec décor et accessoires, un animateur oscillant entre le sketch de comédie et l’animation et un écran pour projeter quelques dessins de Boulet réalisés en direct, en réponse au jeu des questions – dudit animateur - comme « Si je te demande de représenter l’enfant Geek que tu étais... ».
En fait, une rencontre placée sous la forme d’un petit spectacle, avec bien sûr les classiques interventions du public à la fin mais là aussi, la mise en scène et l’humour était au rendez-vous. Mine de rien, cela permet de revenir sur la carrière de Boulet, sa jeunesse, son travail, son rapport à son blog, ses motivations et sur l’avenir, ses prochains travaux, sa méthode de travail, présentée avec humour, qui vaut le détour.
Tout d’abord, pour un travail de six mois, notre auteur passe un mois à se préparer psychologiquement à travailler, un mois à se tenir prêt, trois mois à tenter de s’y mettre, mais le monde qui l’entoure l’en empêche (tous ces jeux vidéos qui sortent, allons) et le dernier mois à se précipiter comme un fou et à faire des journées de douze heures. Bien sûr, il y a énormément d’humour dans cette description et cet autoportrait peu flatteur mais on sent le fond de vérité, la nécessité de l’état d’urgence pour se débloquer.
Il faut dire que la force de Boulet, c’est sa capacité à dessiner rapidement. Il n’y a qu’à voir le dessinateur à l’œuvre sur un thème qu’on vient de lui donner alors qu’il répond en même temps aux questions. Son principal handicap, c’est l’ennui, qui peut le faire traîner tant qu’il n’a pas le couteau sous la gorge.
Dans cette ambiance de spectacle, sur une scène de théâtre, on est presque surpris quand l’animateur ouvre l’accès au public et lui propose de poser ses questions.
A côté de cela, Trondheim était à l’Opéra de Lyon. Non, rassurez-vous, il n’a pas fait une présentation chantée en soprano de sa carrière.
Par contre, assis devant une table à dessin, avec aussi la présence d’un animateur-interviewer, Trondheim a relevé le défi de dessiner, le temps de la conférence, une page de son prochain tome des Petits Riens. Donc, en répondant aux questions posées par le public ou par l’animateur, Trondheim dessine, et une caméra projette son travail sur un écran géant derrière lui.
On découvre comment procède Lewis Trondheim au feutre et à l’aquarelle. Il explique lui-même que cela fait seulement dix ans qu’il effectue un travail régulier de dessin d’après nature une fois par mois. Un travail qui l’a fait énormément progresser. Car au départ, Lewis n’est pas dessinateur mais scénariste. Sa première œuvre de dessinateur, c’est en photocopiant des cases identiques qu’il l’a réalisée. En le voyant travailler, on imagine facilement les progrès effectués. L’échange est encore plus fort avec le public que dans la rencontre précédente. Lewis s’adresse à nous plus qu’au présentateur. Il nous raconte son travail, sa carrière, sa vie mais donne aussi des conseils à ceux qui voudraient dessiner. Il s’exprime avec franchise sur le statut d’auteur de BD, sur le problèmes des retraites qui vont frapper les artistes, sur sa collaboration avec Sfar, sa décision de directeur de collection de réduire la production pour lutter, à son échelle, contre l’excès de publication BD, son intervention à l’école Emile Cohl... Plein de sujets passionnants, et en plus, en même temps, il dessine !
Apprenti dessinateur, vous connaissez maintenant le conseil de Trondheim : le dessin d’après nature. Il présente aussi ses aquarelles et rassure tout le monde : « Quand vous allez reprendre le dessin, vous allez vous dire : Oh, c’est nul. Et vous aurez raison car vous dessinerez comme quand vous aviez dix ans. Mais c’est la même chose pour tout le monde. Ce n’est pas une raison pour renoncer, c’est une raison pour continuer, travailler et vous améliorer ».
Merci Lewis. Même si tu n’es pas parvenu à finir le dessin, cette rencontre fut un réel plaisir, et nous n’oublierons pas le conseil de la fin : « Autorisez-vous à ne pas finir un livre ! ».
Deux ambiances différentes pour deux rencontres intéressantes. Même si, de par l’organisation de ces rencontres, notre préférence va à celle de l’Opéra - et nous ne comparons pas là les deux auteurs, mais juste la manière dont la rencontre fut organisée -.
Troisième étape, arriver essoufflé au Palais de la Bourse pour s’asseoir dans le fond de la salle Garnier et écouter Hub présenter son travail, à l’appui d’images sur un grand écran. En plus de son œuvre Okko, Hub présente ses collaborateurs, storyboarder, coloriste. La rencontre est surtout axée sur la méthode et les techniques de travail de l’auteur. Là, on découvre les spécificités de Hub, qui a mis en place une technique qui lui est propre. Il faut dire que cela fait dix ans qu’il travaille sur la série Okko. Découpée en cycles de deux albums, il explore et développe avec plaisir l’univers de cette fiction fantastique. Hub explique qu’il avait déjà en tête l’histoire et qu’il est heureux d’avoir eu les coudées franches grâce à son éditeur.
Certes, ses méthodes de travail sont particulières (de son papier employé, layout, au découpage très précis développé avec le storyboard), il nous propose une analyse très complète de sa technique.
Hub reconnaît qu’au bout de dix ans, il est heureux de pouvoir prendre un peu de distance avec cette série enfin achevée. Il a envie d’autre choses et nous avons hâte de savoir dans quelle direction diamétralement opposée va nous emmener sa prochaine histoire.
Trois approches radicalement différentes de l’organisation de rencontres, pour le même festival. Finalement, que l’une nous ait plu plus que l’autre n’est pas vraiment important. Ce qui compte, c’est que nous avons assisté à trois rencontres, à trois choix différents, peut-être en fonction des spécificités de l’auteur, mais surtout, nous l’espérons, dans l’idée d’enrichir votre expérience tout au cours de ce festival.
Et si cela ne vous suffisait pas, au hasard des rues, vous pouviez, avec de la chance, croiser un auteur et échanger avec lui ! Ici, Boulet...
Pour profiter de Lyon BD, il faut se laisser porter, tenter et surtout ne pas se dire : « Oh, j’ai vu une rencontre avec un auteur, pas la peine d’aller en voir une autre, elles doivent être toutes pareil ». Bien au contraire !
Galerie Photos
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.