Le 14 octobre 2022
Christian Petzold revisite le mythe d’Ondine avec un subtile dosage d’ancrage historique et d’échappées oniriques. Une œuvre ambitieuse bien servie par l’interprétation de la lumineuse Paula Beer.
- Réalisateur : Christian Petzold
- Acteurs : Jacob Matschenz, Maryam Zaree, Franz Rogowski, Paula Beer, Anne Ratte-Polle
- Genre : Drame, Romance
- Nationalité : Français, Allemand
- Distributeur : Les Films du Losange
- Durée : 1h29mn
- Date télé : 21 septembre 2023 21:00
- Chaîne : OCS Pulp
- Titre original : Undine
- Date de sortie : 23 septembre 2020
- Festival : Festival de Berlin 2020
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Résumé : Ondine vit à Berlin, elle est historienne et donne des conférences sur la ville. Quand l’homme qu’elle aime la quitte, le mythe ancien la rattrape : Ondine doit tuer celui qui la trahit et retourner sous les eaux…
Critique : En s’attelant au mythe d’Ondine, Christian Petzold renouvelle son cinéma tout en étant fidèle à sa démarche stylistique et thématique. Figure emblématique de la mythologie grecque, Ondine a inspiré de nombreux écrivains, de Friedrich de La Motte-Fouqué (1811) à Jean Giraudoux (1939), en passant par Hans-Christian Andersen (La petite sirène, 1836) et Oscar Wilde (Le pêcheur et son âme, 1891). On pouvait être a priori surpris de voir Petzold tenter de s’approprier ce matériau, lui dont l’univers a toujours eu un ancrage réaliste et historique, avec pour toiles de fond le totalitarisme (Transit), le traumatisme de la déportation (Phoenix), ou le désir de liberté chez les habitants de la RDA (Barbara). Si le cinéaste s’adapte avec aisance à un cadre onirique, à l’orée du fantastique, il fait pourtant d’Ondine un personnage dont l’identité et l’activité se réfèrent à l’Allemagne d’aujourd’hui, et au rapport avec son passé.
- Copyright Schramm Film/ Christian Schulz
Jeune femme émancipée ayant décroché un doctorat d’histoire, elle mène en freelance une activité de guide conférencière et passionne son auditoire par une connaissance approfondie de l’évolution urbaine de Berlin. Un Berlin dont on nous rappelle que ce fut une ville construite sur des marais. Quant au scaphandrier avec lequel Ondine noue une relation sentimentale, après avoir été larguée par son amoureux, il travaille sur un lac de barrage, menant une existence professionnelle qui semble peu palpitante, et pourrait servir de base à un drame social ou une étude néoréaliste. C’est pourtant dans ce contexte d’authenticité psychologique et narrative que le réalisateur introduit le glissement vers le surnaturel, faisant de son récit un conte de fées moderne dans un monde désenchanté. Et il ne faut pas oublier que Phoenix n’était pas qu’un drame historique, mais une mise en abyme qui convoquait le souvenir de Hitchcock et Franju, dans une ambiance fantomatique auquel fait écho le présent opus. « Ondine serait alors un personnage de conte qui veut devenir un être humain. Et nous la voyons essayer de réaliser son souhait. Elle est déjà humaine et veut le rester (…) Mais le monde de la malédiction, des mythes, ne la lâche pas, tout cela lui colle à la peau, c’est un monde brutal qui l’entraîne violemment sous l’eau », précise ainsi le cinéaste.
- Copyright Schramm Film/ Marco Krüger
Bien aidé par son chef opérateur Hans Fromm, Christian Petzold filme alors de stupéfiantes séquences sous-marines, qui rappelleront aux cinéphiles de grands jalons du septième art, tels L’Atalante ou La nuit du chasseur. D’aucuns regretteront une certaine sécheresse dans le traitement, ainsi que l’abus d’extraits de concertos de Bach, sublimes certes, mais qui noient parfois le métrage dans une atmosphère de respectabilité culturelle. Ces quelques réserves ne ternissent pas la qualité globale d’une œuvre subtile, qui séduit par sa capacité à préserver des zones d’ombre, et confirme le talent de la lumineuse Paula Beer, que l’on avait découverte dans Frantz. Elle n’a pas volé le prix d’interprétation féminine qui lui fut décerné au Festival de Berlin 2020, où le film a également remporté le prix FIPRESCI.
– Festival de Berlin : Ours d’argent de la meilleure actrice, Prix FIPRESCI
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