Barbara - Christian Petzold - critique

Critique : Quatrième film du réalisateur allemand Christian Petzold, remarqué pour ses précédentes œuvres mêlant habilement les codes du cinéma de genre et ceux du film d’auteur, Barbara se déroule en Allemagne de l’Est au début des années 80. Narrant le parcours d’une jeune médecin souhaitant passer à l’Ouest pour rejoindre son amant alors qu’elle est visiblement surveillée par le médecin-chef de l’hôpital de province où elle a été mutée, le film décrit avec une précision clinique les conditions de vie de l’époque, entre le calme apparent d’un régime déjà moribond et les tensions sous-jacentes qui règnent entre ses partisans et ses adversaires.
Appuyé par une mise en scène sobre et élégante (primée à la dernière Berlinale), le film montre le contraste entre cette fausse sérénité et l’hypocrisie qu’elle génère, qui confère aux premières scènes une ambiance mystérieuse, immédiatement captivante. Bien introduits par un scénario solide, les enjeux s’éclaircissent au fur et à mesure que l’on en apprend davantage sur les personnages. Entre la paranoïa grandissante de l’héroïne, l’attirance qu’elle partage avec son médecin-chef, la préparation de son évasion par son amant ou encore la découverte des horreurs perpétrés par le régime (symbolisées par les maltraitances infligées à une jeune patiente), l’histoire promet des arcs narratifs intéressants. Les acteurs, tous irréprochables, en particulier Nina Hoss dans le rôle-titre, offrent aux personnages de belles nuances de caractère, si bien que l’on s’attache à eux avec une grande facilité et que l’on devient naturellement curieux de connaître ce que le sort leur réserve.

Malheureusement, bien que le choix de Petzold de prendre du recul sur l’action soit louable et évite à certaines séquences de se faire contaminer par le pathos, la trop grande sobriété de traitement dont il fait preuve a tendance à diluer peu à peu la tension dramatique promise par les premières scènes. Si le film ne manque pas de beaux moments où l’émotion se libère, cette dernière est très souvent contenue et l’empathie ressentie pour les personnages est régulièrement mise à mal. On aurait aimé plus de débordements scénaristiques, plus de puissance dans l’illustration des sentiments des protagonistes, plus de fièvre compte tenu du contexte historique. Il n’en est rien, l’œuvre se contentant d’être irréprochable, à défaut d’être enthousiasmante.
Écrit, réalisé et interprété avec une grande rigueur, Barbara est un beau film auquel il manque cependant un véritable souffle pour nous captiver pleinement. Il est néanmoins toujours réjouissant de constater que le cinéma allemand continue d’explorer les pages sombres de l’Histoire du pays, tout genre confondu, avec un sérieux et des choix artistiques forts qui font parfois défaut aux tentatives équivalentes du cinéma hexagonal.

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