Ne vous fiez pas aux apparences…
Le 25 juillet 2019
Oubliez ses aspects parfois manga ou jeu Xbox. Love Death & Robots est une série à la fois transgressive et subtile, rappelant que le format court est l’exercice le plus difficile du septième art. Défi relevé avec brio.
- Réalisateurs : David Fincher - Tim Miller
- Acteurs : Topher Grace, Mary Elisabeth Winstead
- : Netflix
- Durée : 18 épisodes de 8 à 17 minutes.
- VOD : NETFLIX
- Genre : Fantastique, Érotique, Humour, Ecologie, Science-fiction, Horreur
- Titre original : Love, Death & Robots
- Date de sortie : 15 mars 2019
- Plus d'informations : Love, Death & Robots
L'a vu
Veut la voir
Résumé : Créatures terrifiantes, méchantes surprises et comédie noire convergent dans cette anthologie d’animation pour adultes présentée par Tim Miller et David Fincher.
Avis : Chez Netflix, il y a indiscutablement une science du marketing, appliquée à la stratégie éditoriale et au choix de développements dans leurs productions originales. Si la dernière saison de Black Mirror, réduite à trois épisodes, est décevante, il n’en demeure pas moins que cette série en cinq saisons, a permis au leader de la VOD de creuser un autre sillon dans son catalogue, prêt à recevoir de nouvelles graines, pour le plus grand plaisir des fans, dans un champ où sont déjà cultivées, dans d’autres sillons, des histoires fantastiques pour ados ou de narcotrafiquants. Ici, il s’agit de récolter de nouvelles dystopies sur fond d’intelligence artificielle et robotique.
Avec à la production David Fincher qu’on ne présente plus, et Tim Miller, réalisateur du premier Deadpool et du prochain Terminator (très très attendu pour novembre, puisque Linda Hamilton y reprend son rôle de Sarah Connor), coordonnant plusieurs studios d’animations dans le monde (USA, France, Corée, Canada…), Netflix livre une nouvelle série d’anthologie, pour public « averti ». Ou pas. Or, c’est là le paradoxe et l’exploit de Love, Death & Robots, vrai OVNI, Objet Visuel Novateur et Intrigant, d’être bien plus trompeur que sa première impression.
Le public averti ciblé semble, a priori, fan de mangas, jeux vidéos de commandos en Irak, ou bastons futuristes et autres univers de science-fiction post-punk. Dès lors, si vous ne cochez aucune de ces cases, la tentation est de laisser cette série de petits dessins animés (6 à 17 minutes), qui font le grand écart entre 3D et animation nippone en passant par le cartoon, aux geeks qui la visionneront sur leurs smartphones. Sauf que David Fincher, qui n’a pas pour habitude de faire dans les bisounours, mais dans la violence franche (Fight Club) ou le clinique (les scènes de crimes ou d’autopsies de Seven ou Zodiac) avec Tim Miller, tout aussi en finesse, livrent dix-huit histoires interdites aux moins de 18 ans, qui, pour certaines, n’y vont pas avec le dos de la cuillère question violence ou sexe, s’engagent aussi sur des voies plus déroutantes comme dans Histoires alternatives. Dans cet épisode, Multiversity est une application où on joue à modifier l’Histoire en décidant de changer un événement, et la voix-off explique que la démo qui va être présentée s’appuie sur la requête la plus populaire : la mort d’Hitler enfant. Résultat ? Huit minutes, huit options, dans un style cartoon, furieusement délirantes d’un humour noir méchamment siphonné.
Voilà pourquoi, malgré ses apparences trompeuses manga, geek, post-punk et autres jeux PlayStation ou Xbox, Love, Death & Robots est bien une série « tout public » et que les formes qu’elles empruntent, 100 % animation (sauf L’âge de glace, épisode « mixte », avec Mary Elizabeth Winstead et Topher Grace, en vrai, découvrant d’étranges choses dans leur frigo), sont avant tout au service de vraies histoires et moins prétexte à des exercices formels, même si dans la majorité des cas, ils sont de très haut niveau, avec parfois des techniques un peu oubliées, comme la rotoscopie.
On ne va pas pitcher les dix-huit segments, mais comme dans toute anthologie, certains sont moins bons (aucun n’est mauvais), et d’autres de vrais bijoux d’écritures, de purs concentrés, à se demander pourquoi certaines séries se diluent en plusieurs épisodes de quarante-cinq minutes, alors qu’en dix-sept minutes, on peut raconter une histoire « fleuve », comme dans Bonne chasse, qui débute dans une ambiance Tigres et Dragons et s’achève dans un jus à la Blade Runner, ou L’œuvre de Zima consacré à un mystérieux peintre centenaire, inventeur du bleu Zima, pas vraiment Klein, mais plus Banksy ultra-futuriste. Certes, quelques segments peuvent déranger par leurs côtés gore ou porno-soft, mais ces effets sont plus au service de récits contraints par la durée que vraiment gratuits (une minute d’animation coûte un bras à produire - private joke). Fincher et Miller ne font pas toujours dans la dentelle, mais ils savent parfaitement régler le curseur, comment « ratisser » large et mener des équipes d’auteurs qui réussissent avec brio l’exercice le plus dur au cinéma : le format ultra court.
Si chaque épisode s’ouvre comme un Black Mirror avec en prime un jeu d’icônes façon Ozark (posters, tee-shirts et fonds d’écran en vue ?), confirmant bien un marketing éditorial de Netflix, Love Death & Robots est un tube de dix-huit pastilles à consommer en posologie libre (l’intégrale en une ou deux prises, ou un par un, en injection sur smartphone, dans le bus ou le métro), à la fois divertissantes, voire pour certaines, sévèrement délirantes, mais assez dérangeantes pour nous interroger aussi bien sur notre vie présente qu’un futur qui, selon les dernières nouvelles, ne se présente pas complément sous le meilleur angle. Bref, une réussite positivement transgressive, convenable pour public averti… de plus de 18 ans.
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.