Rééducation amoureuse
Le 25 avril 2011
Sommet d’humour et d’émotion, cette comédie chorale de station thermale, teintée de mélancolie, place définitivement Hiroshi Shimizu au rang des plus grands.
- Réalisateur : Hiroshi Shimizu
- Acteurs : Tatsuo Saitō, Chishū Ryū, Kinuyo Tanaka, Takeshi Sakamoto, Shin’ichi Himori
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Japonais
- Durée : 1h11mn
- Titre original : 簪(かんざし)/ titre anglais: Ornamental hairpin
- Date de sortie : 26 août 1941
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Sommet d’humour et d’émotion, cette comédie chorale de station thermale, teintée de mélancolie, place définitivement Hiroshi Shimizu au rang des plus grands.
L’argument : Un groupe de pélerins s’achemine vers une station thermale. Une jeune femme, Emi, perd son peigne dans un bassin et Nanmura se blesse en posant le pied dessus. Lorsqu’elle reviendra pour s’excuser, une idylle se nouera entre le soldat convalescent en permission prolongée et la jeune femme décidée à ne pas rentrer à Tokyo. Les progrès de la rééducation de Nanmura seront accompagnés et commentés par les autres clients de la pension. A la fin de la saison, Emi reste seule dans la station désertée.
Notre avis : Kanzashi, tourné en 1941, fait écho à Anma to onna, sorti trois ans plus tôt. A l’ouverture, un travelling avant sur une route de montagne précède une troupe de pèlerins qui s’acheminent vers une station thermale, rappelant celui qui accompagnait les deux masseurs aveugles au premier plan du film de 1938. Et à l’arrivée dans l’auberge, ce ne seront pas moins de 18 masseurs qui viendront s’occuper des randonneurs épuisés.
Un autre point commun entre les deux films est leur caractère résolument choral. Certes l’idylle entre Emi (Kinuyo tanaka, une fois de plus sublime) et Nanmura (un Chishu Ryu encore juvénile) occupe une position centrale, mais au moins huit autres personnages ne se privent pas d’y mettre leur grain de sel. Cela nous vaut une jolie galerie de personnages, souvent cocasses : un professeur ronchon qui n’arrête pas de régenter tout le monde (Tatsuo Saito, silhouette familière des Ozu muets), deux gamins facétieux qui accompagnent leur grand-père et assistent Nanmura dans ses exercices de rééducation, un jeune couple (lui n’arrête pas de demander l’avis de sa femme sur tout, ce qui énerve prodigieusement le professeur) et la belle Okiku, qui tente de ramener Emi à Tokyo, vers la vie de femme (sans doute) richement entretenue qu’elle refuse désormais.
La promiscuité de ces personnages dans l’auberge régulièrement envahie par les randonneurs donne lieu à une foule de scènes irrésistibles mais dont l’humour n’est jamais appuyé. Mais c’est néanmoins la lente progression de l’idylle entre Emi et Nanmura qui permet à Shimizu de déployer toute la gamme de ses talents d’observateur attentif et délicat.
Car cet amour naissant puis grandissant ne passe pas par les mots ni par l’effusion sentimentale mais par d’étonnantes scènes sportives : assistée des deux gamins, elle l’encourage, telle un supporter lors d’une compétition, lorsqu’il s’entraîne à marcher de plus en plus longtemps sans béquilles, d’abord d’un arbre à l’autre, puis d’une rive à l’autre par l’étroite passerelle en bois qui traverse la rivière, enfin jusqu’au sommet du grand escalier menant à un temple. Ces scènes à la fois drôles et discrètement émouvantes représentent l’acmé de la méthode Shimizu. Il parvient à y faire vibrer une note qui n’appartient qu’à lui.
Inoubliables aussi sont les toutes dernières scènes, lorsqu’encore une fois, Emi, restée seule dans la station thermale désertée à l’approche de l’automne, traverse la rivière et gravit l’escalier, la caméra, toute proche, l’accompagnant dans sa montée. Le film s’achève sur un presque gros plan, en mouvement, qui ne nous révèle rien des pensées et des sentiments du personnage. Cette fin teintée de mélancolie, mais qui n’arrête rien, donne la mesure de la force de révélation poétique que le cinéma, à son plus haut, peut atteindre.
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