Station thermale
Le 27 juin 2010
Chassés-croisés dans une station thermale autour d’un masseur aveugle, prompt à la bagarre, et d’une jeune femme mystérieuse. Un chef-d’oeuvre athmosphérique, à la fois grave et léger de l’immense Hiroshi Shimizu.
- Réalisateur : Hiroshi Shimizu
- Acteurs : Shin Tokudaiji, Mieko Takamine, Shin Saburi, Takeshi Sakamoto, Shin’ichi Himori, Mitsuko Miura
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Japonais
- Durée : 1h06mn
- Titre original : 按摩と女
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– Sortie au Japon : 7 juillet 1938
Chassés-croisés dans une station thermale autour d’un masseur aveugle, prompt à la bagarre, et d’une jeune femme mystérieuse. Un chef-d’oeuvre athmosphérique, à la fois grave et léger de l’immense Hiroshi Shimizu.
L’argument : Des masseurs aveugles arrivent dans une petite station thermale en même temps qu’une jeune femme mystérieuse, un garçon d’une douzaine d’années avec son oncle célibataire, un groupe d’étudiants ....
Notre avis : Dès les premiers plans de Anma to onna nous reconnaissons la patte de Shimizu, celle qui avait fait merveille dans Arigato san. Un travelling arrière sur une route de montagne précède deux masseurs aveugles qui devisent en marchant. Ils sont à l’écoute du moindre bruit et savent identifier précisément et à distance le nombre de promeneurs et de véhicules qui approchent. Cette acuité de l’écoute semble contaminer tout le film. Notre perception, aiguisée comme jamais, enregistre les mouvements et les humeurs qui agitent la petite station thermale perdue dans la montagne où se rencontrent, outre ces masseurs aveugles itinérants, une femme mystérieuse en fuite, un groupe d’étudiants, un garçon orphelin et son oncle...
Le ton est à la comédie et les gags sont nombreux, s’organisant le plus souvent autour de l’étonnant personnage de masseur bagarreur interprété avec une jubilation contagieuse par Shin Tokudaji. Ses victimes principales sont les étudiants qui ont eu l’impolitesse de le dépasser sur la route et qu’il malmène à deux reprises : la première fois au moyen d’un massage excessivement musclé, la deuxième lors d’une bagarre dont nous ne voyons que les prémisses et les conséquences, Shimizu maniant élégamment l’art de l’ellipse narrative.
Autour de lui s’ébauchent, dans le petit microcosme de la station thermale, des histoires qui resteront en suspens, en particulier une idylle entre la jeune femme mystérieuse, très beau personnage auquel la voix grave et l’air déterminé de Mieko Takamine confèrent une aura puissante, et le jeune homme joué par Shin Saburi qui, d’abord impatient de partir, ne cesse ensuite de différer son départ au grand dépit de son neveu exaspéré par les manèges amoureux dont il est exclu. Ce jeune garçon facétieux et observateur est une autre figure admirablement dessinée qui prouve que Shimizu sait filmer les enfants à la juste distance. Nombre de ses films leur sont d’ailleurs consacrés.
Mais si le ton léger du début n’est jamais totalement abandonné, la gravité, d’emblée sous-jacente, affleure de plus en plus pour imprégner profondément cette oeuvre superbement atmosphérique et d’une stupéfiante beauté visuelle. Le drame pourtant n’éclatera jamais. Simplement, chacun partira de son côté dans la carriole tirée par un cheval de trait qui s’éloigne dans les tournants du chemin menant à la gare (ce cheval nous aura à l’occasion jeté un troublant regard). L’oncle et le gamin d’abord, vainement poursuivis par la jeune femme, avant qu’elle ne parte à son tour, sous le « regard » du masseur resté seul, la caméra tentant de rattraper la carriole en un léger mouvement latéral chargé d’une émotion d’autant plus poignante qu’elle arrive sans prévenir et que le film se garde bien de la souligner.
Nous savons, lorsque s’affiche le mot fin, que le discret Shimizu, qui jamais ne hausse le ton, est un des plus grands et la justesse de son regard est un don inestimable pour le spectateur.
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