Arrêt d’autobus
Le 8 juin 2010
Un merveilleux trajet en autobus sur la presqu’île d’Izu, à la fois drôle et émouvant, avec Monsieur Merci, le chauffeur le plus souriant de la compagnie.
- Réalisateur : Hiroshi Shimizu
- Acteurs : Ken Uehara, Michiko Kuwano, Kaoru Futaba
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Japonais
- Durée : 1h18mn
- Titre original : 有りがたうさん / Arigatō-san
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– Sortie au Japon : 27 février 1937
Un merveilleux trajet en autobus sur la presqu’île d’Izu, à la fois drôle et émouvant, avec Monsieur Merci, le chauffeur le plus souriant de la compagnie.
L’argument : Road-movie : le trajet en bus, par des routes escarpées, de la presqu’île d’Izu à Tokyo, et retour, avec Monsieur Merci, surnommé ainsi parce-qu’il est la gentillesse même et dit "merci" chaque fois que des piétons ou des véhicules s’écartent pour le laisser passer.
Notre avis : Adapté d’une nouvelle de Yasunari Kawabata 有りがたうさん Arigatō-san est un des films les plus connus et des plus attachants de Hiroshi Shimizu.
Il s’agit d’une espèce de road movie puisque la totalité de l’action se déroule pendant le trajet en bus qui relie un village de la presqu’île d’Izu à Tokyo.
Une petite musique pimpante, accordée aux coups de klaxon, accompagne le petit autobus conduit par Monsieur Merci lorsqu’il se lance hardiment à l’assaut des cols escarpés. Il arrive d’ailleurs qu’on côtoie dangereusement les précipices, surtout lorsque le chauffeur observe depuis son rétroviseur ce qui se passe à l’intérieur. On ne peut s’empêcher de penser au merveilleux petit Buñuel mexicain de 1951 La subida al cielo / La montée au ciel.
Le film est rythmé par des figures récurrentes. Des mouvement latéraux sur les paysages sauvages et montagneux nous font partager le point de vue des voyageurs. Les travellings avants sur les piétons ou les charrettes qui obstruent la route ou font signe au chauffeur sont immanquablement suivis des travellings arrière sur les mêmes qui saluent et dont les silhouettes s’amenuisent progressivement, le tout ponctué de arigatos à n’en plus finir. Il y a aussi les écoliers qui courent après le bus à chaque fois qu’il redémarre et que nous voyons ensuite accrochés à l’arrière.
Les pauses sont innombrables, le chauffeur s’arrêtant fréquemment pour converser avec des passants ou transmettre des messages au mépris de l’horaire à respecter, ce qui provoque les récriminations du seul voyageur pressé, les autres accueillant tous les incidents du voyage comme des distractions bienvenues.
D’ailleurs on n’arrête pas de prendre de nouveaux voyageurs qui souvent redescendent au bout de 500 mètres pour les motifs les plus divers. A l’intérieur du bus on discute un peu, mais surtout on se laisse bercer par les cahots de la route ou on fume en silence lors d’un arrêt. La scène avec les volutes de fumée qui envahissent l’habitacle réduit est un des nombreux petits moments de grâce du film.
Les échanges se placent sous le signe de la comédie : tout le monde accepte par politesse les bonbons proposés par la veuve mais refuse le petit coup d’eau de vie offert par la jeune femme à la réputation douteuse. Puis, celle-ci les ayant félicités pour leur politesse et leur abstinence, les voyageurs se ravisent et concèdent qu’un petit coup ne peut pas faire de mal.
Le Japon rural de l’automne 1935 qu’on découvre lors de ce périple est marqué par la crise économique qui oblige une mère à emmener sa fille de 17 ans se prostituer en ville et d’autres jeunes filles à travailler sur les chantiers de terrassement des routes.
Cet arrière plan donne à la comédie légère une tonalité plus grave. Certaines scènes sont sobrement émouvantes comme celle où Monsieur Merci fait ses adieux à une ouvrière qui part vers un autre chantier.
Car malgré sa bonne humeur indestructible, notre aimable et fringuant chauffeur n’est pas indifférent au malheur des autres et il finira même, sur les instances de l’oiseau migrateur, alias la fille de mauvaise vie, par sacrifier les économies rassemblées pour enfin se mettre à son compte afin de libérer la jeune fille promise à la prostitution.
C’est Ken Uehara (1909-1991), futur mari boudeur de Meshi - Le repas de Naruse en 1951, qui, juvénile et souriant, est l’interprète idéal du super-chauffeur. L’oiseau migrateur qui cache ses blessures sous ses manières rudes et son franc parler est incarné avec une discrète et fragile autorité par Michiko Kuwano (1915-1946). Elle sera sublime dans Koi mo wasurete- Coeur enchaîné du même Shimizu en 1937. Mais tous les personnages, drôles et touchants, secoués dans le bus et ballottés par la vie, composent un merveilleux portrait de groupe, dans cette oeuvre sans prétentions mais qui atteint, l’air de rien et comme en passant, l’émotion juste.
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