Le 25 février 2023
- Scénariste : Arthur Croque>
- Dessinateur : Émilie Gleason
- Genre : Document, Reportage
- Editeur : Casterman
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 4 janvier 2023
Un reportage drôle et très bien documenté sur l’addiction à la nourriture.
Résumé : Zazou est une jeune femme boulimique de 19 ans qui se rend pour la première fois à une réunion des Food Addicts Anonymes – équivalent des associations d’alcooliques anonymes – pour comprendre cette maladie qui l’affecte. Là-bas, elle fait la rencontre de femmes et d’hommes aux différents parcours qui partagent leur expérience avec humour afin de comprendre la mécanique de cette addiction.
Critique :Fruit de plusieurs années de recherche et de (ré)écriture du storyboard, Junk Food est une enquête fouillée sur une addiction grave mais très méconnue en France : l’addiction aux aliments industriels. Contrairement à l’alcoolisme ou au tabagisme, l’addiction aux boissons sucrées, aux pâtes à tartinées et aux autres gâteaux industriels ne fait pas l’objet de grands campagnes préventives de la part des pouvoirs publics, en raison du pouvoir économique et du lobbying de l’industrie agro-alimentaire. Et pourtant, comme le révèle l’album dès ses première pages à travers le compte rendu d’une enquête faites sur des rats, l’addiction au sucre est excessivement puissante : en gros, « un rat cocaïnomane, si tu lui laisses le choix entre sa coke et du sucre, il prend le sucre dans 90 % des cas ». Émilie Gleason relate d’ailleurs une anecdote sur ses cousins mexicains qui, lors d’un séjour pour lui rendre visite en France, ont ajouté du sucre au Coca-Cola pour renforcer son goût… En 2018, l’autrice lit l’ouvrage de Bernard Pellegrin, Sucre – Enquête sur l’autre poudre qui révèle les chiffres alarmants de l’addiction au sucre, et l’incurie des pouvoirs publics à ce sujet.
- Émilie Gleason, Arthur Croque / Casterman
Partant de ce constat, Émilie Gleason et Arthur Croque ont pris contact avec des associations de food addicts. Ils ont notamment profité du confinement pour assister à des réunions en ligne, notamment aux États-Unis où ce problème est particulièrement important. L’objectif : donner la parole aux victimes et mettre en lumière la mécanique de cette addiction, ainsi que les solutions pour s’en prémunir / s’en sortir. Pour retranscrire cette parole, les auteurs ont fait le choix d’une mise en scène audacieuse pour l’écueil d’une bande dessinée documentaire ennuyeuse. Loin de toute convention réaliste, Émilie Gleason donne vie à des personnages aux couleurs pétillantes, qui s’allongent et se transforment au gré de la fantaisie de l’autrice et des besoin du scénario. Les dialogues, très percutants, participent à la dynamique de l’ensemble. Le récit comprend ainsi beaucoup d’humour, quitte à diluer la vocation documentaire initiale du propos. Ce parti-pris fonctionne : les récits de vie de Iago ou Bambi s’avèrent particulièrement marquants, et Émilie Gleason parvient parfaitement à retranscrire la dépendance, la douleur et la détresse sociale des food addicts. À cet égard, Junk food témoigne de la capacité qu’a la bande dessinée à rendre compte d’une enquête et à vulgariser des données scientifiques tout en s’écartant des normes – réalisme, accumulation de données – du récit documentaire.
- Émilie Gleason, Arthur Croque / Casterman
En fin de compte, Junk Food tend un miroir au lecteur, matérialisé par le questionnaire en fin d’ouvrage : et si toi aussi, tu étais un food addict qui s’ignore ? De façon plus générale, le récit invite à nous interroger sur nos pratiques alimentaires. Il est probable qu’une fois l’album refermé, le lecteur se posera deux fois la question avant de mettre un paquet de M&M ou un pot de Nutella dans son caddie. Une lecture particulièrement stimulante.
232 pages – 21 €
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