Le 21 octobre 2024
- Réalisateur : Lucie Prost
- Acteur : Finnegan Oldfield
- Distributeur : Paname Distribution
- Festival : Festival International Film Saint Jean de Luz 2024, Festival d’Angoulême 2024
La réalisatrice Lucie Prost, la productrice Lucie Fichot et l’acteur principal Finnegan Oldfield reviennent sur la genèse de cette œuvre singulière.
Résumé : Léo, jeune ingénieur brillant et fêtard qui vit à Berlin, doit rentrer dans son village du Doubs pour vendre les terrains agricoles de son père à une entreprise de forage de métaux rares. Il retrouve sa mère, sa petite sœur, ses copains et son cousin, en désaccord avec le projet de mine. Rapidement, Léo observe d’étranges comportements chez les farios, ces truites qui peuplent la rivière. Il se lance alors dans une enquête hallucinée…
Présenté au Festival du Film Francophone d’Angoulême puis récemment au Festival International du Film de Saint-Jean-de-Luz, Fario s’avère être une œuvre singulière mêlant habilement plusieurs genres : conte fantastique, récit réaliste, thriller écologique, comédie romantique. La réalisatrice Lucie Prost, la productrice Lucie Fichot et le comédien principal Finnegan Oldfield reviennent sur la genèse de cette œuvre singulière.
Avant Fario, quel a été votre parcours ?
Lucie Prost : J’ai d’abord entrepris des études de théâtre puis en sciences sociales car je ne me sentais pas vivre une vie de comédienne et d’intermittence. J’ai néanmoins toujours entretenu une passion pour le cinéma en fréquentant le Renoir à Lons-le-Saunier. Canal+ m’a aussi permis d’affiner ma cinéphilie. Je me rendais dans de nombreux festivals de courts métrages et c’est en découvrant Vilaine fille, mauvais garçon, de Justine Triet, à Côté Court, que j’ai eu une révélation. Cela m’a débloquée et m’a incité à écrire mon premier court métrage, Les Rosiers grimpants, puis mon deuxième, Va dans les bois.
L’originalité de Fario, c’est qu’il mélange plusieurs genres bien distincts, le récit initiatique, le film social, le cinéma fantastique. C’était votre intention ?
Lucie Prost : Le film a été long à écrire, avec beaucoup de motifs, de thématiques qu’il a fallu hiérarchiser. Il lui reste quelque chose de cette densité de thématiques. Donc oui, il y a une dimension merveilleuse, mêlée à un peu de social et de comédie romantique. Cela me stimulait bien dans l’écriture de ne pas m’arrêter sur un seul genre et même d’en mélanger plusieurs. C’est la raison pour laquelle le film a été complexe à financer car il n’était pas « marketable » et semblait peu adapté au marché. Mais aujourd’hui, les premiers spectateurs semblent touchés par sa richesse visuelle et thématique. Ils apprécient de découvrir une œuvre qui sort des sentiers battus.
- Finnegan Oldfield, Meghan Northam
- © 2024 Folle Allure - Yukunkun. Tous droits réservés.
Une œuvre si singulière a-t-elle été facile à produire et financer ?
Lucie Fichot : Fario est un double premier film, celui de Lucie et le mien. Dès lors, il a fallu fournir un travail important sur le scénario pour convaincre les financiers. Nous avons su faire preuve de persévérance, en écoutant les retours des uns et des autres mais tout conservant le cœur, l’âme du projet d’origine qui faisait notre désir commun. Il nous a fallu presque quatre ans pour boucler le financement. La Résidence Émergence nous a donné confiance car nous avons compris que notre projet pouvait susciter de l’intérêt, voire de la sympathie. Tout comme le CNC où nous avons obtenu l’avance sur recettes. Cela a été notre première source de financement et elle s’est avérée décisive pour convaincre d’autres partenaires potentiels. C’est après cela que nous avons pu trouver un distributeur, Paname, puis que nous avons bénéficié du soutien de la région Bourgogne-Franche-Comté et de Canal+.
Autre singularité de ce projet : sa faculté à mettre en place un récit lumineux alors que le personnage principal s’avère assez sombre…
Finnegan Oldfield : Lucie parvient à faire entrer l’amour, la joie, la vie dans ses films. On y trouve une dimension burlesque, fantasque, absurde. J’aime ce cinéma qui laisse de la place aux comédiens. Cela crée une dynamique de groupe qui est agréable à jouer et à regarder. Mon personnage est certes sombre puisqu’il s’autodétruit, mais il est entouré de personnages lumineux, chaleureux, qui ont tous un côté enfantin très rassurant. Cette bienveillance, présente dès l’écriture, est un cadeau pour les acteurs comme pour les spectateurs.
Comment avez-vous abordé la mise en scène ?
Lucie Prost : Je ne voulais pas faire un film militant, social ou technique. Il fallait construire un récit et une mise en scène qui convoquent l’intime, sans trop de réalisme ou de naturalisme. Par moment, je me demande moi-même si la trajectoire du personnage de Finnegan n’est pas juste une traversée mentale. Son enquête est plus psychique que scientifique. À croire que les paysages qu’il traverse ne sont que des espaces mentaux. Cela a guidé ma réalisation afin d’aborder cette histoire comme un conte.
- Meghan Northam, Finnegan Oldfield
- © 2024 Folle Allure - Yukunkun. Tous droits réservés.
Comment parvient-on à rendre un film poétique sans trop verser dans le naturalisme ?
Lucie Prost : Tout est une question de découpage, de choix de focale, de décors. On essaie de ne pas être trop réaliste dans l’agencement des séquences. Le travail sur le son permet également de déréaliser les choses. La musique aussi d’ailleurs. Avec mon compositeur, nous souhaitions mêler quelque chose de traditionnel à des sons plus organiques. Cela amène un côté contemporain, terrien.
Ce qui participe à cet aspect fantastique proche du conte, c’est cette nature jurassienne. Pourquoi avoir choisi de poser vos caméras dans le Jura ?
Lucie Prost : Le Jura a été le territoire de mon enfance. J’ai tant arpenté cette vallée avec ma grand-mère. J’entretiens un lien très fort avec ce lieu mâtiné d’imaginaire. J’y vois quelque chose de mythologique sur le lien entre l’humain et le vivant.
Ce film est aussi l’histoire de la déconstruction d’un masculin, n’est-ce pas ?
Finnegan Oldfield : Ce personnage a besoin d’aller vers plus d’expression de lui-même, de lâcher ses émotions et d’affronter son trauma. Quand on se sent mal, on n’a pas envie que nos proches nous voient ainsi. C’est la raison pour laquelle, au début du film, il s’est installé à Berlin où il côtoie des gens nouveaux. Mais étant obligé de revenir chez lui, il est exposé à sa famille. Or, on ne peut pas cacher aux gens qu’on aime que l’on ne va pas bien. Le fait de se déconstruire lui permet de se rapprocher de lui-même, puis des autres.
Propos recueillis par Nicolas Colle
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