Il était 2 fois Arthur - La chronique BD

Creuser les mythes du passé pour en extraire la moelle, qu’elle soit porteuse de revendications, de messages et de modèles, ou seulement pour son exotisme, son rêve et sa noirceur. Cette envie d’aller chercher dans une époque pas si lointaine, un siècle plus tôt pour être précis, et en faire surgir un conte moderne, fait de princes égoïstes et de duels truqués, de racisme assumé et de folie mondiale, c’est un peu l’ambition du duo Carlé/Antico. Cette dernière a visiblement eu l’envie, le courage, la force de raconter non pas une mais deux lignes de vies, l’une aussi costaud que l’autre est frêle. Un défi à la hauteur des destins, qui est ici relevé, avec un roman graphique et biographique d’une extrême justesse.

Nine Antico, Grégoire Carlé / Dupuis

Le choix du noir et blanc, avec une reliure pourtant fushia, fait évidemment sens, puisque le combat oppose avant tout deux couleurs de peau, un pan de l’histoire que le récit de Johnson ne cesse de gratter, de montrer les lambeaux. Parfois jouant sur le grotesque, tantôt sur l’onirique, souvent insistant sur le modernisme des esprits et des corps, le dessin de Carlé sait temporiser où emballer quand le scénario et la vie dictent le tempo. Il faut souligner la diversité des lieux, des campagnes des États-Unis jusqu’aux capitales comme Paris, Barcelone, mais aussi le Mexique... Bref, une folie que là aussi le duo a su embrasser avec brio. 

Nine Antico, Grégoire Carlé / Dupuis

Excellente biographie(s) au pluriel, convaincant roman graphique, Il était 2 fois Arthur est un grand album, peut-être même plus grand que les deux hommes qu’il décrit.