Il se considérait comme un artisan et non comme un artiste. Il racontait ses histoires de manière linéaire, sans artifices, sans flash-back et souvent sans ellipses, dans un style limpide et fluide que l’on aurait tort de croire simple : il représente le comble du savoir-faire. Il prenait le cinéma pour ce qu’il est, un divertissement populaire. Pour autant - et même justement pour cette raison - il ne s’est jamais autorisé le moindre compromis. Et ses ambitions étaient à la hauteur de celui qui fut son modèle : D. W. Griffith, rien de moins.
Bien sûr, les choses lui ont été plus faciles qu’à d’autres, de par sa naissance dans un milieu favorisé : une famille de riches commerçants de l’Indiana qui émigre en 1906 en Californie où elle vient d’acquérir des orangeraies. Howard Hawks a dix ans. Passionné de mécanique, il entre bientôt dans une école spécialisée. A seize ans il possède une voiture puis un avion, il participe à des courses, s’engage comme pilote pendant la Première Guerre mondiale. Il entrera à Hollywood par la petite porte, pas du tout certain d’y trouver sa voie. Mais, évidemment, quand on est grand, blond, athlétique, quand on peut compter sur l’argent de papa, quand on joue au tennis avec Mary Pickford, quand on est à tu et à toi avec Douglas Fairbanks... ça aide à faire son chemin.
A partir de 1923, Howard Hawks se fait un nom en tant que scénariste. En 1926, il tourne son premier long métrage, The road to glory (il en fera le remake en 1936). La célébrité attendra encore quelques années. Il l’obtiendra grâce à Scarface, biographie du fameux gangster Al Capone (1932). Dès lors, sa carrière est lancée. Avec un brio hors du commun, il se frotte à tous les genres. Western, film de guerre, film noir, comédie, aventure, à chaque fois (ou presque), bingo !
Qu’a-t-il donc de si particulier qui fait que ses films marchent ? Tout d’abord, il sait choisir avec soin ses comédiens. De nombreux débutants ou quasi débutants lui doivent d’ailleurs leur carrière, Carole Lombard, Lauren Bacall, Montgomery Clift, entre autres. Il est un directeur d’acteurs hors pair : pensez à John Wayne, par exemple, qui n’a jamais été aussi bon que sous la férule de Hawks. Il leur donne à dire des dialogues au naturel confondant, et en cela se démarque très vite des autres réalisateurs venus du muet qui s’embourbent dans le théâtre filmé. Et puis, surtout, il raconte des histoires. "Je suis un raconteur d’histoires, disait-il, c’est la fonction principale du réalisateur." Des histoires qui brossent, à travers ses quelque quarante films, un portrait fidèle et honnête de la société américaine telle qu’il la percevait.
Howard Hawks a accompagné (et même souvent devancé) avec le plus grand des talents l’évolution du septième art pendant plus de quatre décennies jalonnées de films mémorables, et continue d’influencer de nombreux réalisateurs d’aujourd’hui. En 1977, âgé de 81 ans, il tirait sa révérence avec la discrétion qui a marqué sa vie de bout en bout.
Filmographie (extraits)
– The road to glory (L’ombre qui descend, 1926)
– The dawn patrol (La patrouille de l’aube, 1930)
– Scarface (1932)
– Twentieth century (Train de luxe, 1934)
– Barbary Coast (Ville sans loi, 1935)
– The road to glory (Les chemins de la gloire, 1936)
– Bringing up Baby (L’impossible Monsieur Bébé, 1938)
– Only angels have wings (Seuls les anges ont des ailes, 1939)
– His girl Friday (La dame du vendredi, 1940)
– Sergeant York (Sergent York, 1941)
– Air Force (1943)
– To have and have not (Le port de l’angoisse, 1945)
– The big sleep (Le grand sommeil, 1946)
– Red River (La rivière rouge, 1948)
– La chose d’un autre monde (The thing from another world, 1951)
– The big sky (La captive aux yeux clairs, 1952)
– Monkey business (Chérie, je me sens rajeunir, 1952)
– Gentlemen prefer blondes (Les hommes préfèrent les blondes, 1953)
– Rio Bravo (1959)
– Hatari ! (1962)
– Man’s favourite sport ? (Le sport favori de l’homme, 1964)