Les chemins de la gloire

Champion multigenre, Hawks aborde avec succès le film de guerre. On y retrouve avec bonheur son univers.

L’argument : Face-à-face entre deux officiers d’un régiment français pendant la Première Guerre mondiale. L’un, Laroche, ne perçoit la guerre qu’à travers les combats héroïques, l’autre, Denet, est plus humain. Ils s’opposent quant à leur conception du devoir mais aussi pour l’amour d’une femme.

Notre avis : Immense classique parmi les classiques d’Hollywood, Howard Hawks a abordé tous les genres et livré un nombre impressionnant de chefs-d’œuvre à l’intérieur de chacun d’entre eux. Que ce soit avec le policier, dont il contribue à mettre au point la grammaire dans Scarface (celui de 1932), le western avec Rio Bravo, La rivière rouge, La captive aux yeux clairs la comédie avec L’impossible monsieur Bébé, le film noir avec Le grand sommeil... et bien d’autres encore, il a une filmographie admirable.
Peut-être influencé par la grande vague pacifiste qui traverse les années 30, en tout cas très intéressé par Les croix de bois de Raymond Bernard, Hawks en livre un quasi remake avec Les chemins de la gloire. Incursion dans le film de guerre donc, dans laquelle des hommes agissent face à la tâche qu’ils ont à accomplir, non sans recul mais sans hésitation ; les personnages hawksiens s’inscrivent définitivement dans l’action. La guerre, pour horrible qu’elle soit (Hawks ne dissimule pas son aversion), doit cependant être menée. A cet argument principal s’ajoutent deux intrigues secondaires : une histoire d’amour triangulaire (situation des plus classiques dans son cinéma) et de génération (très riche, elle permet de symboliser l’entrée dans la modernité en même temps que les rapports de filiation). Tout cela filmé à hauteur d’hommes, avec beaucoup de respect pour chacun des personnages (tous bénéficiant d’une grande épaisseur, jamais réduit à jouer les utilités). Avec également un sens consommé de la construction du récit et du rythme, chaque scène s’imbriquant parfaitement dans la précédente. Enfin, on remarque que si le film est tourné en studio (élément très clairement identifiable), certaines séquences de bataille se rapprochent du documentaire (faisant par exemple penser à [Verdun, Vision d’histoire>8965], de Léon Poirier), petite touche originale et singulière. Au final, un nouveau grand film, finesse et solidité mêlées.

LE DVD

Les suppléments

L’éditeur propose deux entretiens réalisés par Noël Simsolo. Le premier voit intervenir Jean-François Rauger, de la Cinémathèque française. Il replace avec clarté le film dans l’œuvre d’Hawks, dont il dresse au final un instructif tableau. Paul Vecchiali, offre un point de vue encore plus intéressant car plus personnel et sensible. Abordant par exemple l’homosexualité latente de son œuvre, sa vision du monde et de l’humanité, c’est avec la radicalité qu’on lui connaît (Les hommes préfèrent les blondes serait raté, Hitchcock en prend pour son grade...) qu’il s’exprime. Toujours un bonheur, tant chacune de ses interventions est stimulante.

Image & son

Contrat rempli dans ce domaine. Les contrastes du noir et blanc apparaissent dans toute leur splendeur, et la qualité de la copie est parfaite.