Le 12 janvier 2013
- Acteur : Emmanuelle Riva
- Festival : Les Oscars 2013
Qui aurait cru que l’actrice légendaire d’Hiroshima mon amour serait un jour nommée aux Oscars ? C’est chose faite grâce à sa prestation magistrale dans Amour de Haneke.
La nomination d’Emmanuelle Riva à l’Oscar de la meilleure actrice pour Amour est en soit un événement. L’interprète d’Anne dans le film d’Haneke n’est pas et n’a jamais été une star, mais une comédienne culte du 7e art, rarement médiatisée et pourtant vénérée par un noyau de cinéphiles. En 1959, cette comédienne de théâtre, inconnue du grand public, crève l’écran dans le film d’Alain Resnais Hiroshima mon amour, qui révolutionne l’esthétique du cinéma. À l’instar de Falconetti dans La passion de Jeanne D’arc, elle semblera pendant toute sa carrière marquée par un rôle unique : ce personnage de Française vivant une histoire d’amour au Japon et se remémorant une tragédie sentimentale la fait entrer dans la légende. Elle envoûte le spectateur par son jeu distingué et sa voix, mélodieuse, unique, aussi originale et sophistiquée que celles de Delphine Seyrig ou Jeanne Moreau. Mais contrairement à ces autres égéries de la Nouvelle Vague, Emmanuelle Riva ne connaît le vedettariat que pendant quelques années : on se souvient de sa prestation auprès de Jean-Paul Belmondo dans Léon Morin, prêtre (Jean-Pierre Melville, 1961), ou de son excellente interprétation de Thérèse Desqueyroux (1962), dans la première version du roman de Mauriac, adapté par Georges Franju.
Ses apparitions sont ensuite espacées à l’écran, mais elle brille à la scène et réapparaît au cinéma dans des rôles épisodiques, notamment dans Y a-t-il un Français dans la salle ? (Jean-Pierre Mocky, 1982), Liberté la nuit (Philippe Garrel, 1984), et Trois couleurs : Bleu (Krzysztof Kieslowski, 1992), dans lequel elle incarne la mère de Juliette Binoche. En 2012, c’est son grand retour dans Amour, sous la direction de Michael Haneke, dans un rôle de malade en fin de vie initialement prévu pour Annie Girardot. L’actrice et son partenaire, Jean-Louis Trintignant, triomphent au Festival de Cannes, où le film décroche la Palme d’Or. Avant une probable nomination aux César (où elle est désormais favorite), Emmanuelle Riva remporte le prix d’interprétation aux European Film Awards, est lauréate au Boston Society of Film Critics Awards et est nommée pour la meilleure actrice dans plusieurs sélections internationales dont les BAFTA. Sa citation aux Oscar la fait succéder à Claudette Colbert (naturalisée américaine), Simone Signoret, Anouk Aimée, Marie-Christine Barrault, Isabelle Adjani, Catherine Deneuve, Juliette Binoche, Marion Cotillard et Bérénice Bejo, dans le cercle des rares françaises honorées par l’Académie, et ce un an après la victoire de Jean Dujardin pour The Artist. Une belle consécration pour une actrice aussi rare que subtile et modeste, aujourd’hui âgée de 85 ans ; et sa chance de l’emporter (face à Jessica Chastain, Jennifer Lawrence, Naomi Watts et la jeune Quvenzhané Wallis) est loin d’être négligeable.
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