DE9/Transitions

Véritable légende des platines, l’Américain Richie Hawtin est de retour avec DE9/Transitions, troisième étape de son voyage initiatique au travers de la techno, de ses multiples composantes et des évolutions que la technique du mix à subies depuis l’arrivée des nouvelles technologies de synthèse et d’échantillonnage. Vous pensez contemporain ? Richie Hawtin vous répond dancefloor.

À l’origine il était Plastikman. Un blondinet de Detroit, fan de Derrick May (autre légende vivante) et de la scène techno locale, qui voit dans le mix la forme d’expression artistique du futur. Perfectionniste infatigable, il atteint très rapidement les limites du mix classique à deux platines et se met en quête de nouvelles solutions. Avec Decks, EFX & 909 il est le premier à ajouter boîte à rythmes et effets digitaux à son mix, bien avant que les grands manufacturiers n’intègrent cette technologie directement dans les tables de mixage des DJ. La deuxième étape intervient en 2001. Avec DE9 : Closer to the edit, l’informatique fait son apparition. Là ou certains enchaînent des morceaux en ajustant les tempos, Hawtin travaille une fois de plus la forme de demain en développant l’interaction de fragments et boucles. Et ce, quelques mois avant l’avènement de logiciels comme Ableton Live. Hawtin, toujours une longueur d’avance ?
Débarquée il y a quelques jours dans les bacs du monde entier, la dernière évolution de son concept DE9, DE9/Transitions, s’intéresse cette fois à la charnière centrale du Djing, la transition, et de mettre au centre du mix ces moments qui sont là a priori pour calmer le dancefloor et lui permettre de reprendre ses esprits. Le résultat est tout simplement magnifique. Ce mix, qui tient plus de l’album d’ailleurs, n’en finit pas de monter, d’évoluer, de s’entremêler voire de s’entrechoquer. Les centaines de tracks utilisés s’empilent à l’infini sans jamais provoquer l’overdose. Le travail de production est incroyable. Là où l’accumulation pourrait avoir un effet néfaste, elle devient une force. La gestion chirurgicale des beats donne l’impression que le travail d’Hawtin est plus proche de celui du producteur que de celui de DJ. En tout cas la frontière est, au final, très floue.
Mais une fois écouté en stéréo, cet album prend son envol final sur un système 5.1 de home cinéma. Hawtin fait office une fois de plus de visionnaire en faisant évoluer la techno de la 2D à la 3D et intègre les notions de profondeur et de spatialité à celles de temps et d’amplitude. Du coup, l’expérience de DE9/Transitions flirte avec l’excellence en dolby surround. L’auditeur se sent alors complètement immergé dans les constructions tantôt anarchiques tantôt monolithiques que nous offre le DJ. Une performance ultime et visionnaire ou la technologie se met au service d’un artiste qui se met lui-même dans une situation de danger permanent. La très grande classe.