Comment je me suis radicalisée en féminazie – Isa, Gaudelette - la chronique BD

Critique : Dans cette salve d’histoires drôles, on suit Isa dans son parcours – son combat – d’autrice mais aussi dans son engagement progressif dans la lutte pour l’égalité hommes/femmes, le tout traité sur le ton de l’humour.
Isa parvient à nous entraîner dans son quotidien, car si elle se moque des hommes qui ne veulent pas reconnaître que les femmes ne sont pas en situation d’égalité dans notre société, elle ne s’arrête pas à eux et sait aussi user de l’auto-dérision devant sa capacité à défendre la cause féminine.

La richesse de cette BD vient de ce combat incessant que découvre, puis que mène Isa, et qui n’est pas gagné pour quelqu’un qui ne sait pas s’exprimer en public. En effet, Isa n’a pas le sens de la répartie qui lui permet de clore sur le vif le bec de ses contradicteurs. Nous pouvons tous nous identifier à ce personnage, car nous sommes nombreux à souffrir de ces lacunes.

Ces enchaînements d’histoires courtes de quelques pages nous permettent aussi de comprendre ce que les féministes reprochent aux hommes d’aujourd’hui. Les termes anglophones pleuvent, mais c’est aussi ce regard, ce machisme ordinaire, comme il existe un racisme ordinaire, que Isa nous dévoile au travers de ces pages. Il peut venir de la famille, d’amis, de rencontres, de gens qui ne sont jamais mal intentionnés, mais qui ne se rendent pas compte de l’impact de leurs mots.

Alors qu’on suit Isa en train de vouloir changer les choses, à son échelle, on prend conscience de ces travers à corriger dans son entourage et probablement chez nous.

Isa, Gaudelette / Fluide Glacial

Le dessin d’Isa, avec ses personnages à gros nez, rappelle forcément le graphisme d’autres auteurs ou autrices. Mais ne vous fiez pas aux apparences : cette racine commune n’empêche pas Isa de développer son propre style.

Le futur de Isa âgée est traité en violet et blanc, avec des cases aux bords arrondis. Le présent tient dans des cases aux bords carrés, avec un dessin tout en aplat de couleur. Les personnages sympathiques, un peu traîne-savates, un peu nonchalant, parfois énervés et ronchons, nous entraînent dans ce monde où le plus malin n’est pas forcément celui qui le pense.
Les compositions le plus souvent en trois bandes découpées en une à trois cases par planche apportent une unité sur l’ensemble de la BD et laissent assez de place à des plans larges, des vues d’ensemble, tout en pouvant se resserrer sur des gros plans.

Les couleurs permettent de créer des ambiances, ou de faire ressortir le cocasse de situations, en traitant tout un plan de personnages et décors de la même couleur, et en laissant le personnage central de la scène avec son jeu de couleurs habituels.

Comment je me suis radicalisée en féminazie est une BD qui traite autant du machisme ordinaire, des moyens de le combattre, des excès dans ces combats que des galères d’une autrice de BD qui a du mal à joindre les deux bouts. Une BD instructive et surtout drôle.