Change pas de main - Le Test DVD

Le PPP (porno-polar-politique) de Vecchiali est une drôle de descente aux enfers, ludique et terrifiante.

L’argument : Madame Bourgeois, femme importante du milieu politique parisien, est victime d’un chantage à la veille de décrocher une place de ministre : elle reçoit des films pornographiques dans lesquels elle reconnaît sans mal son propre fils... Elle décide d’engager Mélinda, détective de choc qui, avec sa commère Natacha, va tenter d’élucider le mystère. D’une boîte louche, « Le Shanghai-Lily », à des recoins parisiens de plus en plus secrets, d’un travesti nécrophile à un étrange mime, les deux détectives sont embarquées dans un monde où les risques se paient de la vie...
Film pornolitique habité par Jean-Christophe Bouvet autant que par la guerre d’Algérie, polar hawksien — The Big Sleep n’est pas loin et Mézières est une épatante sœur de « Bogey » — film à retrousse-code et à tiroirs, Change pas de main (Change pas demain...) est une œuvre essentielle, drôle, poétique, unique, où se croisent des figures déjà myth(olog)iques — Mézières en imper, Bouvet sans, Delahaye en Général et Surgère en particulier... (Texte de présentation du DVD / La Traverse - éditions de l’œil)

Notre avis : Sorti peu de temps avant l’instauration du classement X ..., le porno-polar-politique de Paul Vecchiali, co-produit par Jean-François Davy, a sans doute quelque peu dérouté les amateurs de Femmes, femmes, ...
Change pas de main est pourtant du Vecchiali pur jus par ce refus de la demie mesure, cette manière frontale d’aborder le sexe et de juxtaposer les genres (film noir, mélodrame, comédie musicale) sans se préocuper de trouver des alibis ou d’enrober les choses pour mieux les faire mieux passer.
Cette crudité, proche de celle de Fassbinder mais en plus joyeux, s’accompagne, comme toujours, d’un goût prononcé du retournement, de ce qu’il appelait lui-même : renverser le cliché par le drame.
(…) Mais l’allégresse est toujours sous tension, inconfortable, minée par l’émotion furtive ..., l’amertume ..., l’effroi même, comme lorsque la caméra s’écarte de la scène du meurtre et traverse la penderie pour découvrir la chambre secrète d’où Isa, l’air impénétrable, écoute les horribles couinements de l’assassin avant d’aller mettre un disque pour les couvrir.
Bref : on s’amuse beaucoup mais on ne sort pas tout à fait indemne de cette drôle de descente aux enfers.
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Le DVD

Change pas de main - DVD La Traverse

La Traverse et les éditions de l’œil proposent une édition exemplaire sous forme de livre - DVD dans une collection qui comporte trois autre titres de Vecchiali.
Les suppléments

Les compléments sont abondants et tous passionnants, comme dans les autres volumes de la série (Les ruses du diable ; C’est la vie ; La machine).
– On se précipitera sur La Cérémonie (2014, 22 minutes), un court métrage tourné en même temps que Nuits blanches sur la jetée. Le principe en est simple sur le papier : on va voir deux fois la même suite de scènes, à ceci près que le rôle interpété par Parcal Cervo dans l’ Hypothèse 1, est tenu dans l’Hypothèse 2 par Astrid Adverbe. Comme toujours chez Vecchiali, ce qui ailleurs s’épuiserait en un jeu gratuit devient ici source d’étonnement (les variations inévitables), d’émotion (le rôle du père que le cinéaste interprète lui-même à deux reprises), d’émerveillement même.
La découverte de ce joyau est complétée par un entretien croisé avec Astrid Adverbe et Pascal Cervo, intitulé judicieusement D’enjoués joueurs.
– On ne manquera pas de s’intéresser aussi aux entretiens autour de Change pas de main, en priorité ceux avec Paul Vecchiali (C’était Mado ?), Jean-Christophe Bouvet (Dans la bande) et Noël Simsolo ( Je ne vois pas pourquoi on simule), mais aussi aux commenaires de Mathieu Orléan (Elle contemple des rushes pornographiques et joue avec des images) et d’Axelle Ropert ( Revigorante frontalité).
– Les entretiens autour de Paul Vecchiali sont en partie les mêmes que sur les autres DVDs de la série, sauf celui avec Serges Bozon qui est réparti sur les quatre volumes.
– Le livre cartonné de 48 pages contient des commentaires d’époque de Paul Vecchiali, Noël Simsolo, Myriam Mézières, Jean-Christophe Bouvet, Jean-François Davy, Hélène Surgère, Sonia Saviange, Michel Delahaye, Nanette Corey, Françoise Giret, Mona Mour, Liza Braconnier, Roland Vincent, le texte de la chanson On m’appelle Mona Mour, la filmographie du cinéaste, des photogrammes du film et des photographies du tournage.

Image

Le report effectué avec soin, rend justice à la photo légèrement agressive, aux couleurs crues, de Georges Strouvé. Du très bon travail.

Son

Réalisation irréprochable de ce côté là aussi, qui permet d’apprécier dans les meilleures conditions le travail de Jacques Gauron (prise de son) et de Roland Vincent (musique).