La maison sans toit
Le 31 mai 2015
Prise de rique et émotion sont au rendez-vous dans le théâtre en plein air de cette déroutante comédie musicale anti-sociologique.
- Réalisateur : Paul Vecchiali
- Acteurs : Jean-Christophe Bouvet, Hélène Surgère, Liza Braconnier , Michel Delahaye, Paulette Bouvet, Béatrice Bruno, Chantal Delsaux, Ingrid Bourgoin
- Genre : Comédie dramatique, Comédie musicale
- Nationalité : Français
- Editeur vidéo : La Traverse
- Durée : 1h27mn
- Date de sortie : 28 janvier 1981
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Résumé : Une cité de banlieue étrange et banale à la fois, comme la vie même. Une vie qui se réfugie dans le terrain vague cerné par les buildings : enfants qui dévalent les talus en criant, amoureux qui pique-niquent dans l’herbe, se disputent et se réconcilient tendrement à l’abri des buissons ; vieillards qui, de leur banc, regardent vivre les autres. Solidaires par force, ils organisent la vie de la cité, mais chacun poursuit son rêve solitaire et secret. Dans ce décor, Ginette, indépendante et têtue, lutte pour construire sa vie à sa guise. Mais quelle vie ? Faut-il travailler ou se consacrer à ses enfants ? Garder un mari qui entrave sa liberté ? Ou se laisser prendre en charge par un amant dévoué ? Aller habiter chez une grand-mère prête à jouer les bonnes fées ? Accepter la tendresse bourrue mais tonique de son amie Simone ? Que choisir ? Comment choisir ? Son désarroi lui suggère une initiative qui se révélera périlleuse : elle décroche son téléphone, appelle la radio France-Expert, Rachah des Rangers, conseillère en psychologie, est au bout du fil...
Critique : Entre deux projets intimes, longuement mûris et requérant des moyens importants,
Corps à cœur (Je serais mort si je ne l’avais pas fait) et En haut des marches (où Danielle Darrieux joue le rôle de sa mère), Paul Vecchiali se lançait au début de l’été 1980 le défi de ce film léger, écrit très vite sous l’effet de la colère après avoir écouté par hasard une émission de Macha Béranger à la radio, puis tourné en extérieurs, en quelques jours, dans un terrain vague de Villejuif.
La gageure technique consistait à tourner en plans séquences de quatre minutes (une bobine de 120 mètres en 35 mm) et en une seule prise après une simple lecture à plat (comme on essaye un costume ; un principe qu’il essaye d’ailleurs d’appliquer sur tous ses films) pour éviter que les acteurs se regardent jouer et ne tombent dans la caricature ou simplement la psychologie.
- C’est la vie - Vecchiali 1980
- © Guilor - La Traverse 2015
Le côté performance, toujours présent chez Vecchiali qui sait combien il peut être stimulant, libérateur même, de s’imposer des contraintes, se manifeste de façon plus visible ici que dans d’autres titres du cinéaste, notamment par le travail sur les couleurs (bleu, blanc, jaune, rouge) et la musique (la chanson délibérément un peu ringarde interprétée à la fois en direct par Chantal Delsaux et doublée, les deux voix se superposant, tout comme les danseurs en arrière-plan doublent les personnages).
Le risque, assumé, était que le dispositif tourne par moments à vide et que le tour de force et la charge pamphlétaire (contre la sociologie à deux sous) prennent le pas sur l’émotion.
Le film n’est effectivement pas totalement réussi mais, comme presque toujours chez Vecchiali, il profite, se nourrit de ses défauts mêmes et c’est souvent quand ça coince que l’émotion surgit : gaucherie de certains acteurs, chorégraphies approximatives, dialogues un brin sentencieux, délibérément naïfs (l’exquise grand-mère déclarant : Que vous êtres vieux ! - Enfin, c’est de votre âge !), clichés assumés pour être mieux contredits (la géniale Hélène Surgère en Mme Delordre, la concierge).
- C’est la vie - Vecchiali 1980
- © Guilor - La Traverse 2015
C’est la vie, dont l’univers coloré fait souvent penser à Demy (sur le mode : plus c’est pimpant, plus c’est dérangeant), est dédié à Geneviève Thénier et Germaine de France, en écho aux Ruses du diables. Chantal Delsaux, la nouvelle Ginette / Solange, y est irritante, parfois, pleine d’énergie et toujours imprévisible : une femme ordinaire qui est tout sauf ordinaire.
Elle aussi ne peut que fuir la tentation (le piège) du bonheur mais si elle part, c’est en emportant (Vecchiali dixit) dans sa valise les couleurs du film.
Un film vif, drôle, émouvant, inconfortable, qui n’a pas froid aux yeux.
Le DVD
- C’est la vie - Vecchiali (1980)
- Copyright : La Traverse
La Traverse et les éditions de l’œil proposent une édition exemplaire sous forme de livre - DVD dans une collection qui comporte trois autre titres de Vecchiali.
Les suppléments
Comme dans les autres volumes de la série (Les ruses du diable ; La machine ; Change pas de main), les compléments sont abondants et passionnants :
– Un court métrage de commande, La terre aux vivants (1994, 11 minutes, avec Françoise Lebrun et Vecchiali lui-même), plaidant pour l’incinération des défunts sur un mode délibérément didactique, mais à la première personne et sans chercher à en imposer ni à imposer quoi que ce soit.
– Plusieurs entretiens autour du film insistent sur le côté performance (le tournage en trois jours et la contrainte de la prise unique) et ses stimulantes limites. Ceux avec l’auteur (Un rien de temps) et l’acteur Jean-Christophe Bouvet (La petite musique objective) sont particulièrement savoureux, mais on ne manquera pas d’écouter aussi le témoignage de Chantal Delsaux (Ne pas fatiguer la spontanéité) et les commentaires de Mathieu Orléan (Entomologie)
– Les entretiens autour de Paul Vecchiali sont en partie les mêmes que sur les autres DVD de la série, sauf celui avec Serges Bozon qui est réparti sur les quatre volumes.
– Le livre cartonné de 48 pages contient des extraits du scénario, le texte de la chanson Femme d’aujourd’hui, des extraits de presse (Claudine Bories, Georges Guégant, Ignacio Ramonet), ainsi qu’une filmographie de Paul Vecchiali, des photogrammes du film et des photographies du tournage.
Image
Les couleurs pimpantes étant au cœur de la démarche esthétique du film il était indispensable que la photo de Georges Strouvé bénéficie d’un report impeccable. C’est le cas ici.
Son
Réalisation irréprochable de ce côté là aussi, qui rend justice au travail d’Antoine Bonfanti et Jean-François Chevalier (prise de son) et de Roland Vincent (musique).
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