Bamnan and slivercork

L’histoire de Midlake doit à peu près ressembler au conte de fée du groupe de rock, si un tel concept existe. Une histoire mille et une fois répétée dans l’histoire du rock, mais pourtant sans cesse différente. Celle d’un groupe de potes prisonnier d’une petite ville aux vitrines d’ennui (ici Denton, Texas), qui tue le temps à coups de mélodies et d’histoires où l’imaginaire règne en maître. Car Midlake, c’est avant tout un son moelleux, cotonneux, qui ne se refuse aucun confort : des instruments à vent, des cordes, des bois, mais aussi des scies musicales et de vieux synthétiseurs aux sonorités oubliées. En clair, un support idéal pour des histoires à dormir, ou à dormir debout. En l’occurrence, le mystérieux Bamnan and slivercork baigne dans une atmosphère à la Brazil, où de gentils humains sont contraints de travailler de force pour les méchants "hommes aux monocles". Parfois, un gentil humain essaye d’échapper à ses maîtres, mais comme il le fait en ballon, il ne va pas très loin (He tried to escape)... Le plus souvent, les humains sont oppressés et victimes (Kingfish pies), et doivent se contenter de quelques regards complices ou de quelques chansons pour tenir le coup (Mopper’s medley). Bref, une sorte de concept-album naïf et paranoïaque, un univers qui doit autant à Magritte (les gentlemen aux monocles et aux chapeaux melon) qu’à Matrix. Mais l’essentiel est finalement ailleurs...

L’essentiel, c’est de constater avec quelle maîtrise sonore ces cinq Texans parviennent, et ce dès leur premier album, à se hisser à la hauteur de leurs illustres contemporains de Grandaddy ou Sparklehorse, tout en tutoyant déjà par moments le grand Robert Wyatt. C’est d’autant plus fort que Bamnan and slivercork a été réalisé à la maison, avec pour seuls outils les moyens du bord, et une bonne dose d’ambition et d’imagination. En cela, Midlake rappelle également un autre grand groupe texan en devenir, lui aussi pétri d’ambition et de panache, à savoir la chorale bariolée de The Polyphonic Spree.