Le 24 mai 2005
Réel ou rêvé, le monde ? Les deux, mon capitaine.
Réel ou rêvé, le monde ? Les deux, mon capitaine.
Il est difficile parfois de savoir si le monde appartient au rêve ou à la réalité. Sur l’écran, Locataires s’achève. Quelques mots pour boucler un film qui n’en compte presque pas, pirouette finale citée de tête, et la tête, à ce moment-là, était loin.
Réel ou rêvé, le monde ? Les deux, mon capitaine, et rarement œuvre artistique n’est plus délicieuse que lorsqu’elle nous promène entre eux. Pas quand elle nous balade de l’un à l’autre dans un fatigant va-et-vient, non, mais quand elle nous fait danser sur le mince fil qui relie ce grand tout. Cela tient souvent à peu de choses. Un battement d’ailes de papillon, le léger décalage d’une case dans Quartier lointain suffisent pour nous faire vaciller et pour renvoyer Hiroshi l’homme d’affaires dans la peau du gamin de quatorze ans qu’il était.
A peine un mouvement du corps dans le film de Kim Ki-duk, une cassure dans le manga de Jirô Taniguchi, et le doute est là et nous, ailleurs. La littérature, dans tout ça ? Ses charmes, pour nous ravir, ne sont pas les mêmes. Il faut le propos, la musique des mots, le rythme, le frémissement léger des lignes qui prennent le large. Alors on oublie le livre lui-même, les mains qui le tiennent, et dans cette douce tempête qui nous agite furtivement on entend Shakespeare nous glisser à l’oreille : "Nous sommes de l’étoffe dont les rêves sont faits. Notre petite vie est au creux d’un sommeil."
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