Le 19 décembre 2005
Joyeux Noël ? Parlez-en à mon disquaire.
Joyeux Noël ? Parlez-en à mon disquaire.
Consommons, c’est de saison. Lisons, aussi, évidemment. Je viens de recevoir un courrier de mon disquaire. Inquiétant. Pas le disquaire, encore que, mais son courrier, qui en appelle à la solidarité de ses clients pour sauver son travail de sélection et de proximité. En parler dans ces "Lignes du large" ? Pourquoi pas, le sort des petits disquaires n’ayant rien à envier à celui de leurs cousins libraires.
Mon disquaire ne le cache pas : il ne lance pas ce cri de gaieté de cœur. Et s’il se le permet, c’est avant tout parce que son enseigne s’identifie à un rôle plus culturel que commercial. Rôle de défricheur, de découvreur, de passeur qui, sous la double concurrence du virtuel et des grandes surfaces, passe de moins en moins. Des conseils, qui en demande encore ?, regrettait deux jours plus tôt une libraire, pas petite celle-là, installée à deux pas.
Pas gai, tout ça. Acheter disques et bouquins chez des indépendants constituait déjà un acte militant. Va falloir désormais acquérir des "actions de solidarité" pour continuer de pouvoir militer. On en est là. Joyeux Noël quand même. Et bons achats !
"A la mythologie de la différenciation et de la diversification extraordinaire des produits, on peut opposer l’uniformisation de l’offre, tant à l’échelle nationale qu’à l’échelle internationale : la concurrence, loin de diversifier, homogénéise, la poursuite du public maximum conduisant les producteurs à rechercher des produits omnibus, valables pour des publics de tous milieux et de tous pays, parce que peu différenciés et différenciants, films hollywoodiens, telenovelas, feuilletons télévisés, soap operas, séries policières, musique commerciale, théâtre de boulevard ou de Broadway, best-sellers directement produits pour le marché mondial, hebdomadaires tous publics."
Pierre Bourdieu, Contre-feux II, éd. Raisons d’agir
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