Le 7 novembre 2005
S’émerveiller, dans un Pacifique de papier, de la magie des mots.
S’émerveiller, dans dans un Pacifique de papier, de la magie des mots.
Acrobate, Raymond Queneau faisait danser les mots sur le drôle de fil de l’Oulipo. Poète, Nicolas Bouvier les tisonnait "pour un peu de couleur", tandis que Samuel Beckett avouait qu’ils avaient été ses seuls amours, enfin, "quelques-uns". Un écrivain peut-il ne pas aimer les mots ? George Orwell, en tout cas, en craignait le pouvoir, parlant de "mots tombant sur les faits comme de la neige, brouillant leurs contours et recouvrant tous les détails", tandis que Victor Hugo, lui, les affublait d’une vigoureuse paire de jambes et lançait : "Braves gens, prenez garde aux choses que vous dites !/Tout peut sortir d’un mot qu’en passant vous perdîtes".
Les mots ont aussi leurs charmes, évidemment. Ceux vantés par l’abbé de L’Attaignant, qui promettait "la chose" à celle qui lui passerait "le mot". Ceux, plus délicats, de la poétesse Emily Dickinson, qui a inspiré à Michel Garneau cette petite merveille qu’est Emilie ne sera plus jamais cueillie par l’anémone (éd. Lanctôt). Emily y est devenue Emilie, sa sœur Lavinia Uranie, et lorsque celle-ci annonce à la poétesse son départ pour l’Europe, la "cousine des écureuils" lui demande, prière qui dit toute la magie des mots : "Si vous croisez un maëlstrom, saluez-le pour moi, je n’en connais que le mot et il me fait frissonner". Moi aussi, du coup.
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