L’image du souvenir
Le 7 avril 2021
Adaptation littéraire sensible et subtile, ce récit d’un amour contrarié, d’un beau classicisme, confirme le savoir-faire de Nicole Garcia et offre à Marion Cotillard l’un de ses meilleurs rôles.
- Réalisateur : Nicole Garcia
- Acteurs : Marion Cotillard, Alex Brendemühl, Louis Garrel, Brigitte Roüan, Victor Quilichini, Aloïse Sauvage, Victoire Du Bois
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Distributeur : Universal - StudioCanal
- Date télé : 31 juillet 2024 20:55
- Chaîne : Arte
- Date de sortie : 19 octobre 2016
- Festival : Festival de Cannes 2016
Résumé : Gabrielle a grandi dans la petite bourgeoisie agricole, où son rêve d’une passion absolue fait scandale. À une époque où l’on destine d’abord les femmes au mariage, elle dérange, et on finit par la croire folle. Ses parents la donnent à José, un ouvrier saisonnier, chargé de faire d’elle une femme respectable. Gabrielle dit ne pas l’aimer, a le sentiment d’être enterrée vivante. Lorsqu’on l’envoie en cure thermale pour soigner ses calculs rénaux, son mal de pierres, un lieutenant blessé dans la guerre d’Indochine, André Sauvage, fait renaître en elle cette urgence d’aimer. Ils fuiront ensemble, elle se le jure.
Critique : Adapté du roman Mal di pietre de Milena Agus (Éditions Liana Levi), ce film sensible et touchant confirme les qualités d’écriture de Jacques Fieschi et l’élégance de style de Nicole Garcia. Il s’agit de leur huitième collaboration. Si celle-ci a pu trouver des baisses de régime avec Selon Charlie ou Un balcon sur la mer, Mal de Pierres, après l’émouvant Un beau dimanche, s’avère une réussite romanesque. La structure en flash-back, bien que peu novatrice, permet de mieux cerner les motivations d’une jeune femme prise au piège de ses sentiments et des préjugés d’une société archaïque. Folle, ou perçue comme telle par la petite communauté qui la stigmatise, Gabrielle ne renonce pas à ses rêves et montrera, même inconsciemment, de quoi son amour grandiose est capable.
- © 2016 Trésor Films. Tous droits réservés.
« Ce destin de femme incarne pour moi la forme de l’imaginaire, la puissance créatrice dont nous sommes tous capables lorsque nos aspirations, nos sentiments, nous conduisent aux extrémités de nous-mêmes, à notre propre dépassement », a déclaré Nicole Garcia, qui s’est appropriée le matériau initial, s’éloignant de la trame du roman sans en trahir l’esprit. Il en ressort un récit alliant simplicité narrative et complexité psychologique des personnages, qui flirte un temps avec le fantastique mais sans s’y frotter véritablement (ce qu’ont déploré certains), préférant la suggestion et l’installation du doute aux ruptures radicales de ton et de genre. On est bien sûr à mille lieues des fulgurances de Max Ophuls (Madame de...) ou Jane Campion (La leçon de piano), qui ont filmé la passion dévorante avec plus d’ardeur. Mais Nicole Garcia n’a pas l’ambition de renouveler les formes cinématographiques et s’inscrit davantage dans la lignée du classicisme maîtrisé du Claude Sautet de Un cœur en hiver ou du Claude Miller d’Un secret.
- © 2016 Trésor Films. Tous droits réservés.
Il va sans dire que ce cinéma est largement porté par l’équipe artistique et technique ainsi que l’interprétation. La photo de Christophe Beaucarne (L’écume des jours) joue habilement des contrastes entre les cadres spatiaux (campagne, mer, montagne, ville) dans lesquels se meut l’héroïne, quand la musique de Daniel Pemberton (Steve Jobs) apporte un lyrisme réel mais discret. Marion Cotillard incarne avec grâce une Gabrielle en borderline, qui fait écho au personnage campé par Nathalie Baye dans Un week-end sur deux, le premier long métrage de Nicole Garcia. Après De rouille et d’os et Deux jours, une nuit, l’actrice montre une autre facette de son talent et ne démériterait pas pour un prix d’interprétation. On remarquera aussi les compositions d’Alex Brendemühl (le mari) et Brigitte Roüan (la mère), parfaits dans des rôles qui auraient pu conduire à des excès. L’ensemble est donc d’une belle tenue et confirme le talent d’une réalisatrice que d’aucuns s’obstinent à dénigrer.
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christian ambroise 7 novembre 2016
Mal de Pierres - Nicole Garcia - critique
Magnifique film !
Une critique cependant, qui porte sur un "détail technique", négligeable pour la plupart sans doute, mais capable à lui seul de faire perdre une partie de la magie du film : comment avoir pu laisser passer cette scène (qui revient deux fois, au début et à la quasi-fin de film) où l’on voit, devant le taxi arrêté, en gros plan, un camion de livraison sur lequel sont collés trois (!) adhésifs de limitations de vitesse très actuelles (110-100-80, de mémoire), alors qu’on sait qu’à l’époque pendant laquelle se déroule la scène (années 60-début 70 grand max), ces limitations n’existaient pas.
Pour moi, c’est comme si j’avais vu passer dans la rue devant les acteurs quelqu’un avec un smartphone et, quand on est dans le film, ce genre d’image vous en fait sortir de suite...
Danich 13 novembre 2016
Mal de Pierres - Nicole Garcia - critique
Un film merveilleux et très émouvant.
La construction est extraordinaire : j’ai été tenu en haleine par un récit à l’apparence classique et dont l’étonnant rebondissement dans la dernière partie remet en question toutes les certitudes que j’ai eu pendant la narration....
Marion Cotillard est fantastique pour incarner le rôle d’une femme hystérique (au sens freudien) et elle a la chance d’avoir comme mari un interprète (Alex Brendemühl) qui incarne un homme d’une force de caractère incroyable et admirable.
L’ensemble est éclairé par de très belles images et soutenu par une excellente BO qui emprunte,entre autres, à Tchaïkovsky une superbe barcarolle.
Merci à Nicole Garcia de nous offrir une oeuvre d’une telle qualité artistique et émotionnelle.