La valse des pantins
Le 8 juillet 2008
Le système Diastème offre un joli diadème. Intrigues existentielles sur les planches artificielles du festival d’Avignon. Beau spectacle.
- Réalisateur : Diastème
- Acteurs : Bruno Todeschini, Emma de Caunes, Léa Drucker, Olivier Marchal
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 9 juillet 2008
- Plus d'informations : Le site officiel
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– Durée : 1h47mn
Le système Diastème offre un joli diadème. Intrigues existentielles sur les planches artificielles du festival d’Avignon. Beau spectacle.
L’argument : Un couple de comédiens qui vient tout juste de rompre et qui joue deux amoureux éperdus, une jeune chanteuse suicidaire, un auteur déprimé, une danseuse tyrannique, un technicien bourru et une spectatrice extravagante...
Tous les mondes et tous les sentiments réunis pendant le Festival d’Avignon, une tragi-comédie sur les caprices de l’amour, de la création et de la météorologie.
Notre avis : Dès le premier plan, les choses sont claires et l’on devra s’y faire : Diastème ne triche pas. En voyant, dans ce plan fixe burlesque, le personnage d’Olivier Marchal se prendre une cataracte céleste inattendue en pleine poire, alors qu’il flânait sur une chaise longue, on comprend immédiatement que l’ancien critique n’a pas vraiment envie de nous « faire croire » à ses histoires tragi-comiques que nous allons pourtant suivre avec plaisir durant près de deux heures. Cette chute d’eau divine instaure en effet un rapport de force initial et déséquilibré entre des personnages-pantins résignés et une autorité démiurgique accablante que nous appellerions destin, en temps normal, mais qui s’apparente ici tout bonnement au scénario. La chaîne de plans qui suit cette entrée en matière nous présente un à un les différents personnages, reliés par leur contact avec l’eau (douche, arrosoir, bouteille en pleine figure...) à l’instar de Marchal (ils finiront d’ailleurs tous dans le même bain, comme le montre l’affiche). La mécanique de leurs corps se met en route, comme s’ils n’avaient jamais existé et que ce liquide quasi-amniotique leur donnait enfin naissance. Les automates sont réglés, le spectacle peut commencer.
Pour autant, même si l’artificialité de l’œuvre nous est présentée de manière frontale, on ne sombre pas dans le piège du simple scénario filmé, écueil que l’on a pu reprocher autrefois au couple Jean-Pierre Bacri/Agnès Jaoui, notamment concernant les films de cette dernière. Si Diastème évite cela, c’est justement parce qu’il préfère montrer les ficelles d’un scénario géométrique, d’abord parallèle (les histoires de chacun), puis perpendiculaire (les histoires se croisent) et enfin circulaire (la chorale finale). Il nous rappelle ainsi que l’émotion peut naître de l’artifice, c’est même le fondement de l’art, en opposition aux tentatives parfois vaines d’un certain cinéma-vérité voire documentaire, terme d’ailleurs parfaitement impropre au cinéma. Le fait que l’intrigue se déroule lors du festival d’Avignon, haut lieu du théâtre français, renforce cette idée et permet de surcroît un jeu plaisant entre fiction théâtrale et réalité diégétique, surtout pour le couple déchiré Maud (Emma de Caunes)/Alex (Frédéric Andrau), obligé de monter sur scène malgré la rupture sentimentale. On pense à cette claque imprévue d’Alex pour Maud, lors d’une représentation, qui crée un délicieux malaise.
Bien sûr, pour que l’émotion, que nous évoquions plus haut, surgisse, il faut également une solide interprétation. C’est le minimum pour espérer que des marionnettes dirigées par une force omnisciente puissent dégager une profonde humanité. Et c’est le cas ici, en premier lieu grâce aux belles partitions de Léa Drucker, Jeanne Rosa, Bruno Todeschini et, ô surprise, Olivier Marchal. Chacun porte élégamment son fardeau, son secret, et se révèle subtilement au fur et à mesure. Quant à Avignon, son bouillonnement euphorique est le cadre idéal pour plonger des êtres électriques, en proie au doute, développant des sentiments et des comportements exacerbés. C’est aussi un beau prétexte pour filmer de larges morceaux de spectacles en tous genres (théâtre, danse, chanson). Diastème aime le spectacle vivant et prend son temps pour filmer ses acteurs en train de jouer. La danse du pantin de Léa Drucker, en plus d’être hautement symbolique pour toutes les raisons que nous avons citées, est tout simplement remarquable. Ces moments donnent à l’œuvre des bouffées d’air salutaires. On en arrive même à penser à Almodovar ! C’est vous dire qu’il ne serait pas insensé de courir voir cette bien curieuse réussite.
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