Peur sur la ville
Le 26 novembre 2023
Un grand western classique porté par des comédiens de légende, doublé d’une réflexion poussée sur la loi et la justice.
- Réalisateur : Edward Dmytryk
- Acteurs : Richard Widmark, Henry Fonda, Anthony Quinn, Dorothy Malone, Wallace Ford, DeForest Kelley, Whit Bissell, Dolores Michaels, Richard Arlen, L.Q. Jones, Vaughn Taylor
- Genre : Western
- Nationalité : Américain
- Durée : 2h02mn
- Date télé : 26 novembre 2023 21:00
- Chaîne : ARTE
- Titre original : Warlock
- Date de sortie : 10 juin 1959
Résumé : Une bande de hors-la-loi dirigée par Abe McQuown sème la terreur à Warlock. Les habitants font alors appel à Clay Blaisdell, dit "l’homme aux colts d’or", pour rétablir l’ordre. Celui-ci débarque dans la petite ville, accompagné de son ami et associé, le boiteux Tom Morgan, qui ne tarde pas à ouvrir un rentable saloon.
Critique : Une vision de L’homme aux colts d’or suffit à assurer une plongée immédiate dans l’âge d’or du grand classicisme hollywoodien, en particulier celui du western, type La poursuite infernale ou La prisonnière du désert : des héros inflexibles interprétés par des stars du genre, une mise en scène superbement épurée, des affrontements dans les grandes rues poussiéreuses d’une bourgade, une dimension de moraliste... Ce sont les ingrédients d’un western fordien, sauf qu’ici c’est Edward Dmytryk qui réalise, un nom reconnu notamment pour ses grands films de guerre (Le bal des maudits), mais pas tout à fait spécialisé dans le genre. Partant d’une trame archétypale où deux as de la gâchette, improvisés hommes de loi, sont engagés pour protéger une ville aux prises de bandits, le métrage s’étend peu à peu dans une mosaïque complexe. Les histoires individuelles et les strates de récit se multiplient et viennent relativiser, voire questionner les valeurs que pourraient véhiculer un tel sujet (justice expéditive, la violence en réponse à la violence).
Le film échappe en effet au manichéisme auquel aurait pu se réduire un simple affrontement bandits-hommes de loi. Dans leur volonté de suspendre provisoirement toute législation ’’officielle’’ et de laisser les pleins pouvoirs à un duo de tueur à gages nommés ’’prévôts’’ (Henry Fonda, dont le personnage donne son titre français au film, et son partenaire estropié joué par Anthony Quinn), les habitants de Warlock prennent le risque de redéfinir les règles morales et judiciaires... et de s’en mordre les doigts. Tandis que cette autorité improvisée apparaît tour à tour comme protectrice et dangereusement tyrannique, l’un des bandits qui terrorisait la ville, John Gannon (Richard Widmark), change de camp et se range du côté de la loi, poussé par un désir de justice morale ; devenant shérif, il s’oppose ainsi à ses anciens camarades criminels puis, par la force des choses, aux ’’prévôts’’ aux méthodes expéditives. Parmi tous ces combattants, on ne sait guère plus qui est du bon côté : la situation prend la forme d’un double affrontement d’hommes et de conceptions de la loi, et permet au western une réflexion élaborée et explicite sur les notions de justice, de violence, de moralité.
Les personnages, très fouillés, ne sont jamais enfermés dans des carcans étroits : au contraire, ils semblent plutôt définis par des évènements imprévisibles et des sentiments incontrôlables (souffrance, amour, amitié, colère, lâcheté) qui font vaciller les catégories de héros et de salauds. Dans L’homme aux colts d’or, il n’est pas rare de voir les ennemis d’hier se ranger dans le même camp, ou bien, au contraire, les anciens amis s’affronter, la mort dans l’âme, pour sauver leur idéal. Un humanisme qui donne au western une dimension poignante et l’ancre dans le réel, plutôt que dans un univers idéal et caricatural. Les numéros d’acteur sont au diapason. Le jeu très intense de Richard Widmark fait sentir tous les dilemmes de son héros déchiré, tandis que le magistral Anthony Quinn excelle dans la composition d’un personnage ambigu qui dissimule de profondes failles. L’homme aux colts d’or porte la noblesse et la complexité du grand western classique et se (re)voit avec un plaisir intact, même cinquante ans après, montrant que ce cinéma-là est loin d’être obsolète.
Le choix du rédacteur
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
Maxou 7 novembre 2013
L’homme aux colts d’or - Edward Dmytryk - critique
Merci pour l’article c’est top