Le 7 août 2015
Déroutant et trop long, Le bal des maudits recèle assez d’idées et de performances d’acteurs pour ne pas être ignoré.
- Réalisateur : Edward Dmytryk
- Acteurs : Hope Lange, Montgomery Clift, Marlon Brando, Lee Van Cleef, Dean Martin, Maximilian Schell, Arthur Franz, Dora Doll, Doris Wiss, Barbara Rush, L.Q. Jones
- Genre : Drame, Action, Film de guerre
- Nationalité : Américain
- Durée : 2h47mn
- Date télé : 10 octobre 2023 23:50
- Chaîne : OCS Géants
- Reprise: 12 août 2015
- Titre original : The Young Lions
- Date de sortie : 2 avril 1958
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Résumé : Durant la Seconde Guerre mondiale, l’officier allemand Christian Diestl se retrouve en désaccord avec l’idéologie nazie. De son côté, Noah Ackerman gravit les échelons de l’armée américaine. Et au milieu de cette guerre, un homme apeuré, Michael, cherche à se cacher.
Critique : Film monstre par sa durée, son ampleur et ses vedettes, Le bal des maudits est aussi un film oxymore : film de guerre presque sans combats, épopée intimiste, saga à trois, audacieux et convenu… On comprend qu’encore aujourd’hui il décontenance le spectateur qui se sent un peu intimidé, mal à l’aise devant cette masse hétéroclite. D’autant que le scénario d’Edward Anhalt est proliférant et s’attaque à beaucoup plus de thèmes qu’il n’en peut vraiment traiter. En effet, à travers trois archétypes, le juif malingre mais opiniâtre (Montgomery Clift), le riche couard (Dean Martin) et le nazi désabusé (Marlon Brando), il entend parler de culpabilité (thème que Dmytryk devait connaître de l’intérieur pour avoir dénoncé au temps du maccarthysme), de courage, d’honneur, de frustration, mais aussi d’antisémitisme. N’en jetez plus ! Forcément, tout cela en reste au niveau des intentions, et quelquefois du dialogue.
Mais Le bal des maudits vaut mieux que la somme de ses éléments disparates. On sera épaté, même si l’on n’est pas très amateur de l’Actors Studio, par les performances de Brando et Clift. Le premier balance son élégant mépris avec un jeu souverain qui lui fait exprimer par des détails une gamme de sentiments inouïe ; le second, tenace et fermé, porte sur ses épaules des séquences entières : sa manière d’affronter l’antisémitisme de l’armée, par exemple, n’a pas besoin de mots pour atteindre une réelle densité. Face à ces deux monstres, Dean Martin est sacrifié : son personnage est inconsistant, et, il faut bien l’avouer, il n’est pas très à l’aise dans la lâcheté.
En charge de cette imposante machine, sans doute Dmytryk a-t-il été intimidé : les longs tunnels verbeux ou l’histoire d’amour de Clift sont sacrifiés en un académisme soigné. Mais il retrouve sa verve dans quelques séquences qui sont autant de points d’orgue. La libération du camp, évidemment, reste celle qu’on garde en mémoire. Il y refuse le spectaculaire pour privilégier l’émotion et l’indignation, respectivement incarnées par le rabbin et le maire. Pas de pathos ici, on est plutôt dans la litote. De même la prise de conscience de Brando lors du combat en Afrique est-elle pure affaire de mise en scène : Dmytryck filme d’abord les alliés en plan général ; ils sont alors des silhouettes abstraites faciles à tuer. Mais qu’un individu survivant lui apparaisse et, ce faisant, s’humanise, et c’est l’impossibilité de tirer.
Le film se veut une réflexion psychologisante, mais les personnages évoluent peu et de manière pas très subtile. Le courage retrouvé de Martin sonne artificiellement, et le sentiment d’absurde éprouvé par Brando est trop lourdement souligné. Mais là encore, on trouvera des perles cachées dans cette masse touffue : une réplique (Brando encore, qui, lorsque l’un de ses soldats meurt après avoir tenu la promesse faite à son père de tuer un Français, se fait sarcastique : « son père doit être content »), un écho (les deux scènes à Berlin avec la femme du capitaine), un personnage (le responsable du camp qui se plaint de ne pouvoir effectuer sa tâche, tuer six mille prisonniers, faute de personnel), autant de moments qui réveillent l’attention par leur légèreté même.
Une autre force du film réside dans le sentiment du temps diégétique. Au contraire des lieux, affichés sans finesse (un carton ou un symbole : ah ! la tour Eiffel pour indiquer Paris...), peu de dates sont exhibées mais Dmytryck excelle à transformer des détails forts en repères qui structurent le récit. Là encore le cinéaste joue de multiples possibilités (événements, dialogues, images d’archives) avec une finesse renouvelée. Ce n’est pas le moindre mérite de cette œuvre obèse et dissonante, mélange bancal de fulgurances et de balourdises.
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