Le 12 avril 2005
Petit bonheur du rythme de la lecture.
Petit bonheur du rythme de la lecture.
Dans un long entretien radiophonique, Pierre Assouline livrait récemment une confidence que lui avait faite Mary Higgins Clark [1] : si, dans ses premiers romans, l’auteure américaine prenait le temps de poser son intrigue avant de déposer l’un de ses personnages, elle a dû augmenter le tempo.
Terminées, pour elle, "les constructions à la Hitchcock". Plus le temps de fignoler, de chatouiller, de titiller le lecteur. Mais lui livrer dès les premières minutes ce qu’il est venu chercher : un cadavre. L’aveu, il est vrai, ne surprend pas, tant ces accélérations du rythme sont légion. Cas d’école, Le salaire de la peur d’Henri-Georges Clouzot (1953), où la terreur naissait de la lenteur, et son pâle pendant contemporain, le poussif Speed (1994) dont le suspense s’écrasait sur le champignon.
Dénonçant cette tyrannie de "l’impatience", Pierre Assouline pointe du doigt un coupable : la télécommande. Réconfortant si l’on pense que sa vie ne tient qu’à une pile, inquiétant si l’on constate sa banalisation et sa multiplication qui, par chance, a peu de chance de toucher le livre : depuis l’échec cuisant du Cybook, premier livre électronique français, rares sont devenus ceux qui en annoncent la mort.
Bien sûr, l’impatient peut sauter des pages (deuxième droit imprescriptible selon Daniel Pennac). Ou même commencer par la dernière. N’empêche. Il y a pour le lecteur, dans cette incompatibilité profonde entre la télécommande et le livre, comme une résistance à la course du temps. Comme une invitation aussi à prolonger ces moments où, pour rêver un peu ou s’empêcher d’arriver trop tôt à la fin d’un bouquin, il suspend la lecture, les yeux perdus au large des lignes.
[1] Presque rien sur presque tout, Radio Suisse romande - La Première
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