Je mourrai pas gibier

Un premier titre pour une nouvelle collection jeunesse (doAdo Noir) lancée par les éditions du Rouergue. La sombre histoire d’un adolescent, héritier de la haine ordinaire.

Guillaume Guéraud travaille parfaitement à l’économie, ce qui n’enlève rien à son talent. Dans ce récit ramassé et concis, il nous guide au cœur d’un village replié sur lui-même, où tout le monde connaît et épie son voisin. Ce village, c’est Mortagne, patelin dans lequel on devient, de père en fils, ouvrier de la vigne ou de la scierie. Depuis la nuit des temps, une haine héréditaire sépare ces deux mondes, sans que personne ne sache véritablement pourquoi.
Martial aurait dû travailler à la scierie mais il a préféré s’orienter en mécanique, ce qui lui vaut une réputation de mauviette et des regards suspicieux, surtout parmi les siens. Le jeune garçon s’est en plus attaché à Terence, un attardé mental exclu par les habitants du village. Martial va alors découvrir que les siens sont, comme les autres, animés par la méchanceté et la cruauté.
Au cœur de cet univers sombre et brutal, Guillaume Guéraud raconte parfaitement ces campagnes tristes et boueuses, où les préjugés mènent à la folie et la bestialité. Privant ses personnages de toute morale et de toute bonté, il dépeint un univers cauchemardesque et clos, dominé par la bêtise et l’absence de remords. La froideur clinique et l’atmosphère glauque planant sur ce roman en font, paradoxalement, une jolie réussite.