Indigo Street - Sur les routes de Nicolas Bouvier

Flânerie d’un photographe d’aujourd’hui dans les pas de l’écrivain genevois.

Photographe français installé au Japon, Eric Rechsteiner s’en est allé sur les routes de Nicolas Bouvier. Serbie, Turquie, Iran, Sri Lanka, Japon, évidemment, il a promené son œil de voyageur là où l’écrivain voyageur avait su si magnifiquement poser le sien. Eric Rechsteiner n’a pas cherché à saisir, des dizaines d’années après le passage de Bouvier, le temps qui a passé. C’est le monde d’aujourd’hui qui défile devant son objectif, son bon usage impliquant, entre autres, l’émerveillement dans l’instant présent. Sur ses clichés, beaucoup de vie, de personnages aux contours parfois retravaillés, silhouettes évanescentes qui collent à l’œuvre de Bouvier, lui qui, comme le note Anne-Marie Jaton dans son essai consacré à l’auteur suisse [1], a sans cesse tenté "d’effacer cet ego qu’il [avait] eu tellement de peine à se construire".
Peur que les photos seules ne suffisent ? Les images d’Eric Rechsteiner s’accompagnent de nombreux écrits de Nicolas Bouvier qui, certes heureux, font passer par moments au second plan le travail du photographe. Davantage qu’un hommage, Indigo Street n’en reste pas moins un ouvrage très réussi qu’illumine notamment l’une de ces facéties du monde qu’aurait sans doute appréciées Nicolas Bouvier. Ecrit sur un mur d’Istanbul devant lequel passe un corps noir et flou : "Ceylan", surmontant un cœur percé. Une inscription dans laquelle Eric Rechsteiner a vu "un encouragement discret à poursuivre vers l’est, du moins jusqu’à Sri Lanka", cette île que l’auteur du Poisson-scorpion gagna après la Turquie et où il faillit perdre la vie.