Le 10 novembre 2018
Le premier long métrage de Paul Thomas Anderson n’est certes pas son meilleur, mais il constitue un bel exercice de style qui annonce ses œuvres postérieures.
- Réalisateur : Paul Thomas Anderson
- Acteurs : Philip Seymour Hoffman, Samuel L. Jackson, Gwyneth Paltrow, John C. Reilly, Philip Baker Hall, Melora Walters
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Splendor Films
- Editeur vidéo : Gaumont/Columbia/Tristar Home Video
- Durée : 1h42mn
- Box-office : 222.559 $ (recettes USA, 1997)
- Titre original : Sydney
- Date de sortie : 21 novembre 2018
- Festival : Festival de Cannes 1996
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– Année de production 1996
Résumé : John a perdu tout son argent. Il rencontre Sydney et tous deux partent pour Reno. Sous la tutelle de Sydney, John devient un joueur professionnel. Il tombe également amoureux...
- Copyright 1996 Rysher Entertainment, Inc. Tous droits réservés.
Critique : Premier long métrage de Paul Thomas Anderson, ce film fut présenté à la section Un Certain Regard du Festival de Cannes 1996 sous le titre Sydney mais il n’a jamais été distribué en salles. Seule une édition DVD fut exploitée en 2000 (avec Double mise pour titre français). La relative indifférence avec laquelle l’œuvre fut accueillie à l’époque apparaît rétrospectivement injuste. Certes, ce coup d’essai du futur réalisateur culte de There We Be Blood n’est pas exempt de maladresses et carences : un scénario minimaliste, à peine plus étoffé que le récit d’une série B ou d’un épisode de série policière des années 90, un rythme qui peine à décoller dans la première partie, et une certaine froideur qui peut décontenancer, qui est celle d’autres œuvres indépendantes du cinéma américain de la période, ayant traité du thème de la manipulation : on songe notamment à Engrenages de David Mamet ou Lulu on the Bridge de Paul Auster. Et pourtant, Hard Eight mérite une seconde chance, ne serait-ce que par les correspondances qu’il établit avec les films postérieurs d’Anderson.
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- VHS éditée par Gaumont Columbia Tristar en 1999 - Copyright 1996 Rysher Entertainment, Inc. Tous droits réservés.
Les relations ambigües entre Sydney et John font écho aux liens entre l’acteur porno Dirk Diggler et son producteur Jack Horner dans Boogie Nights, la romance improbable entre John et Clémentine annonce l’idylle entre Barry et Lena dans Punch-Drunk Love, l’ascendant de John sur les autres personnages anticipe les comportements du gourou télévisé Frank Mackey dans Magnolia ou du leader charismatique Lancaster Dodd dans The Master. Surtout, on trouvera déjà dans Hard Eight ce ton pessimiste et cette acuité dans la description de figures solitaires qui traversent la plupart des films d’Anderson. Et loin de pétrifier l’œuvre, la froideur qui enrobe la mise en scène apparaît comme une nécessité de mettre à distance des personnages empêtrés dans des secrets inavouables, pour mieux les observer et les disséquer : on appréciera dès lors ces mouvements de caméra sobres, ou ces plans-séquences austères, donnant des casinos de Reno une image désincarnée et faisant ressortir leur inanité, loin du clinquant et de l’atmosphère festive que le cinéma associe généralement à Las Vegas et autres lieux de jeu.
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Il faut aussi souligner la qualité de la direction d’acteurs. Philip Baker Hall est magistral en patriarche mystérieux, quand John C. Reilly montre admirablement les fêlures d’un être ordinaire dépassé par les événements le concernant. Samuel L. Jackson est d’une gouaille jubilatoire, dans une composition proche de sa prestation dans Jackie Brown ; et Gwyneth Paltrow se tire avec honneur de son rôle de ravissante idiote, même si les minauderies de la future interprète de Shakespeare in Love pourront agacer. Au final, Hard Eight n’est certes pas du niveau de Magnolia ou Phantom Thread et il n’a pas l’intensité des premiers films que furent Blood Simple des frères Coen ou Little Odessa de James Gray, qui eux aussi débutèrent dans le polar. Mais l’exercice de style de Paul Thomas Anderson reste une œuvre à redécouvrir qui mérite le détour. On ne peut donc que se réjouir de sa sortie en salle à l’initiative du distributeur Splendor.
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