Copyright Editions Marabout, 2019

Notre avis  : Le début du récit cherche la scène qui tue : plutôt efficace, puisqu’une jeune étudiante disparaît dans un brouillard que n’aurait pas désavoué Carpenter. La suite dénoue les fils d’un récit choral, où l’on ne comprend pas, a priori, ce qui peut unir le destin de deux réfugiés syriens, une victime occidentale, un homme qui écrit de mystérieuses lettres à une certaine Mina. On laisse au lecteur le soin de le découvrir.
Plutôt réussies, les ambiances gothiques sont parfois lestées de passages didactiques, qui tentent d’opacifier le mystère, mais s’apparentent à des fiches Wikipédia. On pense en particulier à ce qui peut alourdir les dialogues, au moment où les flics enquêtent au Père-Lachaise. C’est dommage, parce que les trois policiers qui enquêtent s’avèrent en tous points attachants, même s’ils s’expriment et agissent dans une certaine orthodoxie du polar, qui fantasmerait le quai des Orfèvres. Certains segments parviennent à restituer, avec une économie de moyens louable, le Paris d’Adèle Blanc-Sec ou d’Eugène Sue, qui inquiète et fascine tout à la fois : "Le Zodiac quitta le quai et s’élança dans la brume, ballottant les six flics dans le froid perçant. Une bise glacée née de la vitesse leur cingla les joues".
Il est toutefois regrettable qu’inscrivant son oeuvre sous le haut patronage de Bram Stoker, Sheridan Le Fanu ou Mary Shelley, l’auteur ne quitte pas les sentiers du fantastique gothique, écrit à la lueur des torches, recyclant les poncifs du genre (cimetière, sang, vampire), jusque dans les noms propres qui multiplient les clins d’oeil à des classiques (mention spéciale au Château d’Otrante, titre d’un site fréquenté par la victime, Lucie).
Même si le texte tente de réactualiser le propos à l’aune des drames contemporains, comme la situation des migrants, même s’il s’acquitte de sa tâche avec un professionnalisme appréciable, on aurait aimé un peu plus d’audace et moins d’allégeance aux grands écrivains.