Le 28 février 2012
- Réalisateur : Frederick Wiseman
- Genre : Documentaire
- Editeur : Dulac Distribution
- Editeur : Éditions Montparnasse
- Durée : 2h08mn
– Sortie DVD : 7 mars 2012
L’un des meilleurs documentaires de l’année 2011 disponible dans une édition DVD de qualité !
L’argument : Pendant 11 semaines, Frederik Wiseman s’est immergé dans l’ambiance colorée du Crazy Horse, le plus avant-gardiste des cabarets parisiens, pour essayer de percer ses mystères d’érotisme et de sensualité. Entre la distraction des spectateurs, les préoccupations financières des directeurs et le statut ambigu des femmes sur scène, à la fois danseuses et artistes, et purs objets, l’introspection offre un regard (numérique) inédit sur une troisième institution française après la Comédie-Française et le Ballet de l’Opéra de Paris. Au cœur du cabaret, la caméra suit le metteur en scène Philippe Decouflé et le directeur artistique Ali Mahdavi, qui réinventent les numéros de la célèbre revue de danseuses nues.
- Copyright Sophie Dulac Distribution
Notre avis : Présenté au Festival de Venise 2011 où il fut chaleureusement accueilli, ce grand moment de cinéma-vérité est dans la continuité du travail de Frederick Wiseman, l’un des documentaristes les plus doués, dans la lignée des Flaherty, Grierson, Rouch et autres Depardon. Adepte d’une démarche qui refuse la voix off, l’entretien direct et les images d’archives, Wiseman applique au Cabaret la méthode déployée naguère dans Titicut Follies (1967, sur une prison d’État) ; High School (1968, sur une université) ; Meat (1976, sur le marché de la viande) ; ou encore Boxing Gym (2010). Objet froid et quasiment ethnologique, mais aussi témoignage inédit sur une institution, le film a pu déconcerter les fans du Wiseman de la première période, qui estiment que l’auteur perd un peu son âme depuis La danse, à vouloir se frotter à un univers aux antipodes du sien. Mais c’est précisément parce que Wiseman n’est pas enfermé dans un cadre thématique précis que Crazy Horse fascine et séduit. À l’opposé, ceux qui s’attendent à un reportage télévisuel voyeuriste, un enregistrement culturel destiné à alimenter le rayon musical des Fnac et Virgin ou un produit pour touristes en mal de sensations risquent d’être déçus ; à cet égard, l’affiche du film et les synopsis officiels ne rendent guère service à l’originalité esthétique de Crazy Horse et peuvent susciter des malentendus.
- Copyright Sophie Dulac Distribution
Le documentaire est en fait une belle méditation sur l’origine de l’érotisme, la frontière entre l’art et le commerce, le fantasme et la réalité : « Il existe différents fantasmes dans le monde de ce cabaret, les fantasmes des propriétaires, des actionnaires qui veulent gagner de l’argent […], du public qui vient voir ça, des danseuses acceptant des chorégraphies et des rôles presque nus », déclare Wiseman. Et la succession de plusieurs séquences (réunions de production, de création, auditions, entrée de spectateurs) tente de percer ce désir imaginaire, en gardant la bonne distance avec les protagonistes, et notamment ces jeunes femmes qui ne sont ni des danseuses classiques, ni des strip-teaseuses de luxe. On pourra aussi faire le parallèle entre cette réflexion sur l’illusion et le traitement du spectacle dans l’œuvre de Fellini, Tati ou Ophuls, impression confirmée par l’utilisation judicieuse des partitions musicales. Même si des longueurs et redondances nuisent un peu au dispositif, Crazy Horse est un bel objet qui aurait pu obtenir le César du meilleur documentaire si le jubilatoire Tous au Larzac n’avait pas été en compétition.
Le DVD :
Une belle édition techniquement irréprochable, indispensable pour tout amateur de documentaire et de danse.
Les suppléments :
On aurait aimé découvrir un portrait du cinéaste, des extraits de ses films-clefs, l’une de ses productions télévisuelles ou encore son court métrage I miss Sonia Henie (1971). Mais le documentariste avait une approche radicale par rapport aux bonus, ces films étant des œuvres sensorielles qui ne devaient pas être expliquées par des mots ou suppléments. Le minimum syndical est donc indépendant de la volonté de l’éditeur. On trouvera un livret intéressant comprenant une conversation entre Frederick Wiseman et Pierre Legendre ainsi que la bande-annonce du documentaire La danse.
L’image :
Les couleurs chatoyantes et les effets visuels des spectacles du Crazy Horse sont bien rendus. L’auteur ne cherche pas à esthétiser davantage une revue qu’il filme à juste distance. La sobriété des prises de vue sur Paris est conforme à la démarche du cinéaste qui refuse l’imagerie de carte postale.
Le son :
Son stéréo DTS 5.1. Techniquement parfait, le DVD restitue à merveille l’ambiance musicale du Crazy Horse y compris dans les séquences de répétition. Wiseman lui-même avait supervisé le travail sonore du film, en collaboration avec Emmanuel Croset, son mixeur.
Galerie Photos
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