Le 5 août 2024
L’un des films les plus sombres et mélancoliques de Bertrand Blier, qui transcende un sujet sulfureux par une mise en scène sobre et l’interprétation grandiose de Patrick Dewaere.
- Réalisateur : Bertrand Blier
- Acteurs : Nathalie Baye, Nicole Garcia, Patrick Dewaere, Macha Méril, Maurice Ronet, Maurice Risch, Maurice Biraud, Michel Berto, Jacques Rispal, Henri-Jacques Huet, Yves Gasc, Geneviève Mnich, Sandrine Dumas, Arielle Besse
- Genre : Drame, Teen movie
- Nationalité : Français
- Distributeur : Les Acacias, Parafrance
- Durée : 2h03mn
- Reprise: 11 septembre 2019
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 16 septembre 1981
- Festival : Festival de Cannes 1981
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Résumé : Rémi, vingt-neuf ans, est un musicien à la dérive. Sa compagne, Martine, vient de mourir dans un accident de la route. Marion, quatorze ans, la fille de Martine, reste vivre avec Rémi. Elle éprouve de l’attirance pour son beau-père. Après une longue résistance, Rémi succombe aux avances de Marion.
Critique : Présenté en compétition au Festival de Cannes 1981, Beau-père est l’adaptation par Bertrand Blier de son roman éponyme publié un an plus tôt aux éditions Laffont. Après la veine picaresque des Valseuses (1973) et de Préparez vos mouchoirs (on passera sous silence le peu réussi Calmos), le réalisateur et scénariste avait donné le meilleur de lui-même avec Buffet froid, où son univers s’enrichissait d’un absurde digne de Buñuel et Ionesco, avec une épure dans le style. Plus classique (en apparence) dans sa forme, Beau-père suit une linéarité et s’avère techniquement soigné et irréprochable. Entouré d’une poignée de techniciens et artistes chevronnés (le compositeur Philippe Sarde, le directeur photo Sacha Vierny, la cheffe monteuse Claudine Merlin), Blier réalise un travail de vrai pro, au point que d’aucuns à l’époque avait pu l’affilier à « la nouvelle qualité française », terme quelque peu méprisant pour étiqueter les Corneau, Miller et autres Tavernier qui tentaient de s’éloigner de la doxa de la Nouvelle Vague. En fait, Blier casse ce classicisme en trompe-l’œil, par des motifs apportant un réel décalage. On pense aux monologues du protagoniste pianiste, face à la caméra, auxquels font écho les révélations du couple d’amis (Maurice Risch et Geneviève Mnich), s’adressant eux aussi au spectateur. On pourrait estimer que cela relève du procédé théâtral ou de la coquetterie de style, mais on a bien ici un élément de la « griffe » Blier, qui cherche à impliquer son public, sans avoir recours aux roublardises lelouchiennes.
Mais c’est surtout par son récit que Blier apporte sa marque de non-conformisme, avec l’histoire de Marion (Arielle Besse), jeune adolescente cherchant à séduire Rémi, son beau-père (Patrick Dewaere), après la mort accidentelle de sa mère (Nicole Garcia). Maurice Ronet incarne à nouveau un alcoolique dépassé par les événements avec le rôle du père biologique de la jeune fille, partagé entre le devoir de récupérer Marion et la difficulté à contrecarrer les projets de la jeune fille dont il ignore les intentions réelles. Même en ce début des années 1980, période de post-libération sexuelle, le sujet avait pu paraître délicat, en dépit d’antécédents littéraires et cinématographiques (on songe bien sûr à Lolita), d’autant plus que la jeune actrice avait quasiment l’âge de son personnage au moment du tournage. Pourtant, Blier dépasse ce côté sulfureux par un ton résolument mélancolique et grave. Les thèmes de la mort et de la dépression parcourent un récit dans lequel les rares instants d’humour sont résolument noirs et révélateurs de la politesse du désespoir. Il n’empêche qu’aujourd’hui, à l’aune des témoignages post-#MeToo qui ont secoué le cinéma français, la vision de Beau-père pourra susciter un malaise légitime (il serait d’ailleurs impensable de tourner un pareil film aujourd’hui), ce qui ne remet pas en cause la réussite artistique du long métrage. L’œuvre fut un relatif échec commercial à sa sortie, et Blier devra attendre Tenue de soirée pour renouer avec le succès, après les flops de La femme de mon pote et Notre histoire. Après Série noire et Un mauvais fils, et avant Hôtel des Amériques et Paradis pour tous, Patrick Dewaere terminait sa carrière dans un registre noir, et confirmait qu’il était l’un des meilleurs comédiens français. Il devait être nommé au César du meilleur acteur pour son personnage difficile de Beau-père, mais fut battu par Michel Serrault pour Garde à vue. Sa jeune partenaire Arielle Besse poursuivit une carrière essentiellement théâtrale, loin des feux médiatiques. Elle est décédée en 2022 à l’âge de 56 ans.
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