Le 19 mars 2007
On ne s’attendait pas à un tel uppercut de la part du réalisateur de La parenthèse enchantée, et pourtant : Anna M. secoue sévèrement tous nos sens. Grand film.
Notre avis : Totalement déconseillé à ceux qui détestent les expériences risquées et les plongées dans les tréfonds de l’âme humaine (dans ce qu’elle peut avoir d’inavouable), ce film, suicidaire dans sa démarche, son sujet et son exigence, est une descente aux enfers convulsive. Refusant tout débordement complaisant et larmoyant, Michel Spinosa traite sans faiblir un cas d’érotomanie. Celui d’Anna M., anonyme qui s’incruste dans la vie des autres, petite fille dans un corps adulte pas maître de ses pulsions et asséché par le manque de désir, qui s’invente une romance avec un docteur renommé allant jusqu’à bouleverser l’harmonie tranquille de son couple. Le refus de facilité - le réalisateur y tient et ça se sent - s’exprime également dans le parti pris qui consiste à adopter le point de vue de celle qui agresse le couple et non pas l’inverse, auquel cas les ficelles du thriller auraient été plus démonstratives. En contrepartie, il offre une béance à l’interprétation plus dense et complexe. Si on considère le personnage d’un point de vue plus social que pathologique, on est libre de voir une catalyseuse de tensions qui révèle les secrets bourgeois et gratte le vernis des apparences.
Mais ce film qui rend malade sans effets tapageurs réussit l’exploit de creuser plus profond qu’une simple psychanalyse en bobine. La mutation de cette femme marquée à vie par une cicatrice indélébile sur la jambe renvoie précisément aux dérives organiques chères à Cronenberg, Haynes, De Van, mais finit par ne ressembler qu’à elle-même. Pour une seule grande raison : Isabelle Carré, indiscutable. De plus en plus monstrueuse au fur et à mesure que son personnage sombre, l’actrice (ou ce qu’il en reste) incarne ce voyage au bout de la folie jusqu’à l’écœurement en communiquant le dégoût du corps, de soi, des autres avec une conviction vorace. Son visage d’ange offre un contrepoint paradoxal et diabolique à ce requiem sauvage qui n’en finit plus de déranger.
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