Le 28 juin 2015
- Réalisateur : Jonathan Taieb
Au lendemain de la Marche des Fiertés et de la décision historique de la Cour Suprême américaine de généraliser le mariage homosexuel sur tout le territoire américain, retour sur la sortie du thriller Stand, de Jonathan Taieb. Le réalisateur répond à nos questions.
Au lendemain de la Marche des Fiertés et de la décision historique de la Cour Suprême américaine de généraliser le mariage homosexuel sur tout le territoire américain, retour sur la sortie du thriller Stand, de Jonathan Taieb, thriller sur la vague homophobe qui sévit actuellement en Russie. Le réalisateur répond à nos questions.
© 2015 Grizouille Films. Tous droits réservés.
Avoir-aLire : Drame psychologique, docufiction, thriller... Stand brasse les genres. Pour présenter votre film à nos lecteurs, comment le définiriez-vous ?
Jonathan Taieb : Un film sur des humains, fait par des humains, pour des humains ! Et dans la notion de film, il y a le divertissement, l’engagement et la réflexion que ça implique !
Le sujet, la libération de la parole et des actes homophobes en Russie, est d’une grande violence. Vous achevez d’ailleurs votre film avec une scène dérangeante, d’une très grande intensité. Vous êtes-vous fixé des règles quant au traitement de la violence, quelle soit graphique, verbale ou psychologique ? Pouvez-vous aussi expliquer la situation vécue par la communauté gay sur place ?
La violence dans le film est arrivée très naturellement. Nous nous sommes raccrochés à la narration, et malheureusement et forcément, comme un reflet de la réalité, elle passait par une forte violence psychologique et physique. Elle est totalement nécessaire mais aussi subtile. Pour preuve le classement « tous publics » accordé par le CNC qui a certainement jugé que cette violence avait un rapport pédagogique, mesuré et s’instaurait dans l’intérêt du film.
Je ne peux pas vraiment expliquer la situation vécue par la communauté homosexuelle sur place. Tout ce que je sais est le fruit de nos recherches pour le film, et tout est dans le film. Je me suis intéressé à un fait bien précis, et la situation de la communauté LGBTI en Russie est extrêmement complexe, beaucoup de paramètres sont à prendre en compte et des associations comme Amnesty International ou Russie Libertés font un gros travail autour de cette problématique.
Le portrait politique dressé de la Russie est accablant. Le ton du film est souvent dépressif. Comment voyez-vous la situation pour la communauté homosexuelle ? On ne vous sent pas optimiste.
Le ressenti et l’interprétation du spectateur appartient au spectateur. Dépressif et pessimiste ou combatif et rempli d’espoir, chacun peut avoir sa propre opinion et je crois que c’est la même chose pour la situation des minorités dans un système répressif, c’est trop personnel. Au final, peut-être que c’est grâce à cette loi que la mentalité du peuple soviétique va changer. Le gouvernement russe a lancé une guerre et donc réveillé des âmes de combattants. Ça sera long et compliqué mais je suis persuadé que tout rentrera dans l’ordre pour la communauté homosexuelle en Russie et dans les pays de l’Est.
Vous vous refusez pourtant à porter un jugement à l’égard des Russes en général, qui sont aussi présentés dans votre film comme des gens chaleureux. Quel rapport avez-vous avec le pays ? Comment Stand, qui a tourné dans des dizaines de festivals dans le monde, est-il perçu sur place ? Etes-vous désormais le bienvenu en Russie ?
Évidemment, le but du film n’était pas de blâmer un peuple dont je ne connais ni la culture ni la mentalité. Sur les gens que nous avons côtoyé durant le tournage, 90% étaient, une fois la carapace de glace cassée, bienveillants et chaleureux. Chez les grands-mères qui jouent dans le film, nous passions plus de temps à manger et boire du thé qu’à tourner ! Je crois que STAND est une vraie curiosité pour les ukrainiens et les russes. Certains se sentent offensés, d’autres ne comprennent pas. Les quelques articles montre que nous avons suscité de vives réactions. Le film est maintenant disponible en VOD en Russie, Ukraine et Biélorussie.
Selon quelques journalistes, il me sera difficile d’avoir un visa pour retourner en Russie. J’y retournai peut-être pour filmer le premier mariage homosexuel…
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STAND échappe aux codes et aux formules du cinéma LGBT pour interpeller un public beaucoup plus large. Craigniez-vous de limiter l’exposition du film en le présentant dans de nombreux festivals gays et lesbiens ? A l’exception d’oeuvres plus consensuelles souvent issues de studio, le cinéma indépendant dit "homo" peine à trouver un public en dehors de sa propre communauté ? Comment voyez-vous le public de Stand ? En France et à l’étranger...
Je suis assez fataliste sur ces points : le film trouvera le public qu’il mérite. Je ne suis pas dans les questions marketing de savoir qui va ou qui doit aller voir STAND. Je pense le cinéma comme un média accessible et je déteste le cinéma élitiste. Pour moi, STAND est un film populaire et les premiers retours des spectateurs dits « grands publics » sont particulièrement chaleureux. Le film rentre dans la case qu’on veut bien lui attribuer et j’espère bien que l’homophobie est perçue comme un problème par le plus grand nombre que seule la minorité qui la subit.
Votre film est militant, il combat ouvertement pour les droits de l’homme. Quels sont à vos yeux les plus grands cinéastes ou films militants, ceux qui ont changé votre point de vue sur une cause urgente...
Je ne suis pas sûr de pouvoir définir le genre « militant ». J’ai l’impression que la plupart des films le sont un peu. Je pourrais citer beaucoup de films qui ont façonné mon point de vue sur l’Homme en général, et je crois que c’est ça, l’essence du « cinéma militant ». Je crois que E.T. reste la référence absolue du film de la relation à l’autre. Orange Mécanique et Full Metal Jacket sont de grands films militants aussi, des films témoignages d’une fragile humanité où se côtoie le meilleur et le pire. J’espère que cette réponse vous conviendra.
Merci à Jonathan Taieb et à l’équipe de Grizouille Films, distributeur de STAND.
A l’affiche depuis le 26 juin 2015.
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