Dans l’œil du noir
Le 22 novembre 2014
Toute la maîtrise de Fritz Lang pour un film noir pas comme les autres. Un modèle du genre.
- Réalisateur : Fritz Lang
- Acteurs : Gloria Grahame, Lee Marvin, Jeanette Nolan, Glenn Ford, Jocelyn Brando, Alexander Scourby, Peter Whitney, Carolyn Jones, Robert Burton, Willis Bouchey
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Policier
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Columbia France
- Editeur vidéo : Wild Side Video
- Durée : 1h27mn
- Date télé : 30 mai 2024 23:10
- Chaîne : TCM Cinéma
- Reprise: 15 septembre 2010
- Titre original : The Big Heat
- Date de sortie : 8 décembre 1953
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Résumé : Le policier Tom Duncan se suicide en laissant une lettre où il révèle la corruption de l’administration de la ville qui est sous la coupe du gangster Mike Lagana. Dave Bannion pense qu’il y a une autre raison au suicide de son collègue. Ses soupçons sont confirmés lorsque Lucy Chapman, une entraîneuse, lui apprend qu’il était en parfaite santé et décidé à divorcer pour elle. Le lendemain, Dave reçoit l’ordre d’abandonner l’enquête, mais ne s’y résout pas : Lucy a été assassinée. Ce dernier défie Lagana et l’accuse d’avoir tué la jeune femme.
Critique : Apogée de la carrière de Fritz Lang aux États-Unis, The Big Heat s’inscrit dans la lignée des plus grands films noirs, Assurance sur la mort en tête. Une maîtrise parfaite des codes du genre pour mieux les transgresser, une mise en scène haletante, une vraie complexité dans le développement de la psychologie des personnages, le tout d’une violence sourde et implacable véritablement surprenante pour l’époque, du grand, du très grand Lang.
Réalisateur extrêmement prolifique (un film tous les ans lors de son « exil » américain), Fritz Lang est fasciné par le cinéma de genre et enchaîne trois films noirs entre 1949 et 1953 : House by the River, La femme au gardénia et Règlement de comptes (The Big Heat, son chef-d’œuvre, soit trois ans avant de rentrer terminer sa carrière en Allemagne de l’Ouest où il réalisera un diptyque résolument plus lumineux : Le tigre du Bengale et Le tombeau hindou. Engrenage fatal à l’action trépidante dans lequel le spectateur est propulsé dès les premières secondes du film, The Big Heat est l’exemple même d’une mécanique bien huilée où chaque élément trouve sa correspondance tôt ou tard. La descente aux enfers de Bannion passe par une réflexion sur la place de la loi dans une société entièrement corrompue, idée reprise par Welles quelques années plus tard dans La soif du mal. Contrairement à beaucoup de films épousant la structure du genre, The Big Heat surprend par sa volonté de rupture avec un manichéisme souvent omniprésent. Ce qui intéresse Lang, c’est justement de questionner cette figure trouble du flic qui n’a plus rien à perdre (superbement interprétée grâce au charisme et à la puissance d’un Glenn Ford à contre-emploi) et obsédé par la loi du talion, obligé d’employer les mêmes méthodes que les « bad guys ». Et puis il y a des gueules, dont celle, obsédante, de Lee Marvin, bluffant en tueur psychopathe et implacable, et la beauté agressive pour ne pas dire virevoltante de la ravissante Gloria Grahame, mi-ange mi-démon, dont le destin tragique vous fera froid dans le dos. La violence peut exploser partout et à tout instant, brutale, bestiale, et frappe le spectateur par la justesse de son utilisation. Lang ne cherche jamais le spectaculaire clinquant hormis quelques coups de poing savamment amenés et trouve toujours une manière originale, par le cadrage notamment, de montrer cette violence insidieuse qui concerne tout un chacun. Adapté du roman à succès de William P. McGivern, Coup de torchon, le film parvient à donner corps à des personnages forts traversés par les notions de culpabilité et de rédemption où le rôle des femmes est absolument primordial. Sur un rythme trépidant, Lang nous conte l’histoire d’êtres en sursis dans un monde en totale déliquescence marqué par la fin des idéaux. Le tout en seulement quinze jours de tournage... La classe.
Le test Blu-ray
Les suppléments
Si les entretiens avec Martin Scorsese (6’) et Michael Mann(’11), deux cinéastes pour qui le cinéma de Lang (The Big Heat en particulier), a eu un rôle prédominant dans leur rapport à la réalisation (jusqu’au célèbre Heat en 1996), on reste un peu sur notre faim. On aurait aimé une analyse un peu plus précise du film, même si Scorsese décortique la manière géniale dont Lang filme la scène culte où Lee Marvin ébouillante sa « girl ». Pas de panique cependant, Wild Side propose dans son coffret un livre exclusif de plus de 200 pages écrit par le légendaire critique de cinéma Jean Douchet dont la phrase fétiche sied si bien à The Big Heat : « Le cinéma est l’art d’aimer ». Nombreuses photos et documents d’archives à l’appui, Douchet décline en mots son amour pour le film et le réalisateur tout en procédant à un décryptage minutieux.
L’image
Grâce au Master HD format 4/3, l’éditeur nous gratifie d’une image de toute beauté, lisse et étincelante, avec des noirs intenses et un très bon rendu au niveau du contraste. Presque pas de grain et une grande profondeur de champ qui permet de goûter au mieux à l’ambiance si particulière des intérieurs où tout semble extrêmement ordonné, chaque objet étant placé avec une minutie extrême.
Le son
Le DTS Master Audio haute définition offre une qualité d’écoute exemplaire en VO et VF tandis que l’éditeur propose également de revoir le film dans sa version Mono d’origine. Les dialogues sont fluides, claquent bien, et sont parfaitement clairs. Les sons ambiants, amplifiés dans la version DTS, sont parfaitement mixés avec les dialogues et la musique. L’équilibre parfait, sans fausses notes...
– Sortie DVD & Blu-ray : 26 novembre 2014
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